Prenons davantage en compte le sexe et le genre pour améliorer la santé des populations
« Sexe, genre et santé », tel est le sujet exploré par la Haute Autorité de santé dans son 3ème rapport d’analyse prospective du système de santé adressé hier au Gouvernement et au Parlement. La HAS appelle à une prise de conscience collective de la nécessité de considérer les questions de sexe et de genre de manière globale et nuancée pour mieux soigner et accompagner les personnes et ne pas aggraver les inégalités en santé. Elle formule 10 propositions pour inciter pouvoirs publics et acteurs de terrain à se préoccuper des effets du sexe et du genre dans les différentes étapes de la conception et de la mise en œuvre des politiques publiques de santé et d’accompagnement social.
Si la santé de la population française est plutôt bonne globalement, de grands écarts persistent en considérant le sexe et le genre. Entre les femmes et les hommes tout d’abord, bien que les politiques de santé cherchent à améliorer la santé de tous, à protéger les individus et à garantir un accès large aux soins et accompagnements. Par ailleurs même si ces politiques évoluent et se veulent plus inclusives, les personnes trans et les personnes intersexes peinent souvent à accéder au système de santé dans de bonnes conditions.
Chargée de rendre chaque année un rapport d’analyse prospective du système de santé assorti de propositions pour faire bouger les lignes, la HAS publie aujourd’hui son rapport pour l’année 2020 sur la problématique “Sexe, genre et santé”. Déjà partiellement partagés mais encore peu mobilisés, les constats développés dans ce rapport justifient aujourd’hui un changement d’approche. La HAS formule ainsi 10 propositions à destination de l’ensemble des acteurs - au rang desquels elle se compte - pour inclure davantage les questions et enjeux liés au sexe et au genre dans les politiques publiques de santé et les instruments qui les servent. Ces changements suggérés pour notre système de santé sont issus d'un travail débuté avant l’émergence de la pandémie en France et visent avant tout une évolution sur le temps long. La publication de ce rapport dans le même temps que celui du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes confirme combien l’enjeu est important.
Sexe et genre : des réalités diverses et nuancées
L’analyse du lien entre sexe, genre et santé dévoile un enchevêtrement complexe entre l’influence des facteurs biologiques et celle des déterminants sociaux de la santé des individus. En témoignent des travaux récents fondés sur des approches biomédicales ou sociologiques. De même, la conception du sexe et du genre va au-delà des représentations simplistes. Il s’agit d’observer les situations de manière plus nuancée, et ainsi de dépasser la catégorisation habituelle : la santé des femmes ne se réduit pas à la seule santé reproductive, celle des personnes trans aux questions liées à leur identité de genre, pas plus que celle des personnes intersexes ne se résume aux variations du développement sexuel qui les caractérisent. Enfin, la surmortalité des hommes avant 65 ans devrait préoccuper davantage.
Chaque personne doit être prise en compte dans son individualité biologique et sociale en s’affranchissant des idées reçues. S’il est pertinent de considérer les manifestations et les conséquences des maladies selon le sexe (il est par exemple indispensable de distinguer les signes évocateurs de l’infarctus chez la femme, encore trop souvent confondus avec ceux d’une crise d’angoisse), il faut aussi aller au-delà de la croyance selon laquelle certaines maladies – comme l’ostéoporose - seraient réservées à une sous-population.
Des lors que la réalité complexe nous pousse à nuancer la pensée, les propos et les actes, les politiques de santé doivent elles aussi s’adapter à cette complexité. Un équilibre doit alors être trouvé pour concevoir des stratégies d’action publique suffisamment globales et inclusives, tout en veillant à tenir compte des enjeux particuliers des différents sous-groupes de population. Les effets des politiques sont parfois en trompe l’œil : on peut observer des progrès en moyenne, derrière lesquels se cache une mise à l’écart de ceux qui sont déjà les plus éloignés du système de santé. Ainsi, par exemple si les résultats des politiques contre les infections sexuellement transmissibles sont globalement bons en population générale, ils masquent des difficultés à atteindre certaines personnes vulnérables ou marginalisées comme les femmes migrantes ou les personnes trans.
Impulser le changement : la HAS formule 10 propositions
Le renouvellement des politiques de santé commence par une prise de conscience et une reconnaissance des différences liées au sexe ou au genre dans les résultats de santé, ainsi que par une recherche approfondie de leurs origines. Vient ensuite la nécessité d’adapter, lorsque c’est nécessaire, les politiques et les outils pour les mettre en œuvre. Pour cela, la HAS formule 10 propositions, à destination des pouvoirs publics, des professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social, mais aussi des universitaires et du monde associatif.
Les propositions de la HAS sont organisées autour de 3 grands axes : prendre conscience de l’impact des questions de sexe et genre sur la santé, en tenir compte le cas échéant à chaque étape de la construction des politiques publiques de santé et adapter les instruments destinés aux acteurs de terrain.
Différencier les stratégies d’action publique et leurs outils selon le sexe et le genre n’est pas toujours utile et pertinent mais il est indispensable de se poser systématiquement la question en amont.
La HAS appelle donc les décideurs publics à s’approprier ces enjeux pour que les politiques de santé bénéficient à tous et n’aggravent pas les inégalités liées au sexe et au genre, y compris sur le plan social et médicosocial. Pour cela, elle invite à impliquer les usagers du système de santé et les associations qui les représentent, à la fois dans la réflexion initiale précédant les études d’impact, et comme partenaires pour aller au plus près des personnes concernées.
La HAS souligne la nécessité d’adapter les recommandations et la formation pour faire évoluer les pratiques professionnelles du soin comme de l’accompagnement. Celles-ci doivent être complétées pour intégrer les différences liées au sexe ou au genre, et aider les acteurs de terrain à appréhender ces questions dans leur pratique quotidienne, mais aussi dans la gestion administrative.
Ce rapport s’adresse également à tous les acteurs collectant ou analysant des données de santé, qu’il s’agisse d’opérateurs privés comme d’acteurs publics. L’analyse de ces données, issues de la recherche clinique ou des enquêtes publiques notamment, doit aller explorer plus profondément les causes des disparités constatées, si nécessaire par des études complémentaires. Les résultats sont trop souvent considérés, par habitude, comme valables pour tous. Prendre en compte le sexe et le genre dans la définition des questions de recherche, et veiller à une meilleure mixité dans les métiers de l’analyse des données, sont des façons de mieux mobiliser le patrimoine grandissant de données dont nous disposons.
La HAS invite aussi à mobiliser les universitaires pour qu’ils collaborent à ce changement, en particulier pour définir des méthodes d’évaluation et des indicateurs clés adaptés aux questions de sexe et de genre en santé, qui permettront progressivement d’améliorer la qualité, l’efficacité et l’efficience du système de santé.
La HAS s'engage à appliquer elle aussi ces principes
Autorité publique et indépendante, la HAS prend elle-même des engagements pour une meilleure inclusion des questions de sexe et genre dans ses travaux :
- Dès aujourd’hui en portant ce rapport auprès des instances nationales, européennes et internationales auxquelles elle participe.
- A court terme, notamment en faisant des questions de sexe et genre l’un des axes du plan de formation de ses agents et en menant des travaux sur la pertinence du « sex ratio». Elle sensibilisera également les industriels en intégrant au sein de ses évaluations des produits de santé la préoccupation sur la représentativité homme-femmes dans les données cliniques.
- A moyen terme en intégrant les questions de sexe et de genre dans ses méthodes de travail et ses guides méthodologiques puis en suivant l’impact de ses engagements sur ses productions.
- Et sur le long terme, la HAS s’engage à prendre en compte les différences de sexe et de genre dans son prochain projet stratégique - afin de contribuer à la lutte contre les inégalités.
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