Covid-19 : quels leviers pour vacciner plus vite les personnes les plus vulnérables ?
Comment accélérer la vaccination des personnes les plus vulnérables ? La HAS met à jour ses avis à la lumière des nouvelles données scientifiques disponibles pour répondre à cette question majeure. Elle met à jour ses recommandations sur la priorisation des populations à vacciner contre la Covid-19. Elle élargit sa recommandation du vaccin AstraZeneca aux personnes âgées de plus de 65 ans. Elle finalise enfin son avis sur l’extension des compétences vaccinales des pharmaciens, des sages-femmes et des infirmiers pour les vaccins contre la Covid-19.
Avec chaque jour en moyenne de plus de 20 000 nouveaux cas de contamination par le SARS-CoV-2 et l’augmentation, parmi eux, de ceux qui sont liés à des variants du virus, l’épidémie demeure à un niveau très élevé. La pression sur le système sanitaire reste également préoccupante. Dans ce contexte, la vaccination rapide des plus fragiles est plus que jamais un enjeu central. La HAS a mené différents travaux sur l’organisation de la campagne, la priorisation des populations au regard de l’arrivée progressive des doses et l’évaluation des différents vaccins au fil de leur autorisation par l’Agence européenne du médicament. Elle rend aujourd’hui trois avis à la lumière des dernières données publiées : la revue des facteurs de risque de faire une forme sévère de la maladie, l’élargissement des indications du vaccin AstraZeneca chez les plus de 65 ans et l’extension des compétences vaccinales à plusieurs professionnels pour l’ensemble des vaccins disponibles.
La HAS réaffirme le rôle majeur de l’âge dans la survenue des décès et précise l’influence des comorbidités
Vacciner en priorité les personnes les plus à risque de faire une forme grave de la Covid-19 et les professionnels de santé pour préserver les capacités de notre système de santé : le 30 novembre dernier, la HAS présentait sa stratégie de priorisation des vaccins contre la Covid-19. Elle actualise aujourd’hui ses recommandations relatives aux facteurs de risque de développer une forme grave de la maladie, sur la base d’une revue exhaustive de la littérature et de l’analyse de près de 200 études parues depuis son premier travail. Parmi elle, la HAS a analysé en particulier deux études françaises de grande ampleur : l’étude Epi-Phare menée par l’Assurance Maladie et l’Agence nationale de sécurité des médicaments et des produits de santé (ANSM), et l’étude du Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) réalisée par le département d’information médicale de Bordeaux. Ces études permettent de confirmer que l’âge est le facteur prépondérant dans la survenue de formes sévères et de décès liés à la Covid-19.
Ainsi, d’après l’analyse des données issues des séjours hospitaliers en France, les patients atteints de Covid-19 présentent, comparativement aux 18 à 49 ans, environ :
- 3 fois plus de risque de décéder de la Covid-19 s’ils sont âgés de 50 à 64 ans,
- 7 fois plus de risque s’ils sont âgés de 65 à 74 ans,
- 10 fois plus de risque s’ils sont âgés de 75 à 80 ans
- 16 fois plus au-delà de 80 ans.
Si l’âge joue un rôle majeur, la présence de certaines comorbidités est également un facteur de risque de formes graves et de décès, même si leur impact est moindre. En complément des comorbidités à haut risque de décès[1], déjà identifiées dans son avis du 30 novembre dernier, la HAS ajoute les quatre suivantes :
- les maladies hépatiques chroniques et en particulier la cirrhose ;
- les troubles psychiatriques ;
- la démence ;
- les personnes présentant un antécédent d’accident vasculaire cérébral.
Par ailleurs, parmi les comorbidités déjà identifiées dans son avis du 30 novembre dernier, la HAS identifie des pathologies à très haut risque de décès, justifiant une priorisation quel que soit l’âge :
- des personnes atteintes de trisomie 21 ;
- des personnes ayant reçu une transplantation d’organe ;
- des insuffisants rénaux dialysés ;
En outre, toutes les situations particulières identifiées comme à risque de formes graves ne peuvent être explicitement identifiées à partir de la revue de la littérature. Ainsi, doivent être également priorisées indépendamment de leur âge, les personnes jugées particulièrement vulnérables par leur médecin et présentant des affections préexistantes rares et graves ou des handicaps graves les prédisposant à risque particulièrement accru de décéder de l’infection par le SARS-CoV-2 (déficits immunitaires sévères, hémopathies malignes, maladies rares).
Enfin, la HAS souligne l’attention particulière qui devra être portée aux personnes polypathologiques, qui font partie des personnes à vacciner en priorité. En effet, les études montrent que le cumul de trois comorbidités fait atteindre quasiment le même niveau de risque de décéder que dans la tranche d’âge supérieure sans polypathologies.
Les données en faveur de l’utilisation du vaccin AstraZeneca au-delà de 65 ans
Les données d’une étude écossaise en vie réelle, soumise au British Medical Journal et en attente de revue par les pairs, apportent des résultats très encourageants sur les bénéfices à court terme d’une première dose de vaccin (Pfizer ou AstraZeneca) contre la Covid-19 chez les plus de 65 ans.
Cette étude en vie réelle portant sur la population des 5 millions d’habitants de l’Ecosse a pour objectif d’évaluer l’impact de la vaccination sur les hospitalisations, par groupe d’âge (18-64 ans, 65-79 ans, plus de 80 ans). Quelle que soit la tranche d’âge, la vaccination par un des deux vaccins étudiés réduit significativement le nombre d’hospitalisations. Les effets les plus marqués sont observés de 28 à 34 jours après la première injection : efficacité de 85% pour les 18-64 ans, 79% pour les 65-79 ans et 81% pour les plus de 80 ans. Les analyses différenciées selon le type de vaccin administré confirment que l’impact le plus élevé est observé 28 à 34 jours après la première injection, que ce soit avec le vaccin Comirnaty (EV=85 %) ou avec le vaccin AstraZeneca (EV=94%), ce dernier ayant été administré majoritairement chez les patients de plus de 65 ans.
Face à ces résultats encourageants, la HAS redéfinit la place du vaccin AstraZeneca dans la stratégie vaccinale en élargissant son utilisation aux personnes âgées de plus de 65 ans.
La HAS souligne toutefois que ces résultats portent sur les hospitalisations et ne quantifient pas l’impact du vaccin AstraZeneca sur la survenue de formes symptomatiques de la maladie, ni sur la réduction des décès. Par ailleurs, le manque de recul ne permet pas d’évaluer le maintien de l’efficacité au-delà de 5 semaines après la première dose. Néanmoins d’autres études permettent de montrer qu’un espacement de 12 semaines entre les deux doses du vaccins AstraZeneca maximise son effet protecteur.
D’autres données susceptibles de renforcer les connaissances sur ce vaccin sont attendues très prochainement, notamment l’étude contrôlée randomisée de phase III en cours aux États-Unis et les analyses en vie réelle sur l’impact de la vaccination par le vaccin AstraZeneca en Angleterre.
Des leviers pour accélérer la vaccination des plus fragiles et lutter contre les inégalités d’accès
L’étude écossaise ainsi que les récentes données en vie réelle israéliennes et anglaises confirment le très bon niveau de protection offert par une dose de vaccin et son maintien pendant plusieurs semaines. Ce constat montre l’intérêt de l’espacement à 6 semaines entre les deux doses du vaccin Pfizer, qui permettrait de vacciner plus vite plus de personnes fragiles au cours des prochaines semaines.
Un autre levier pour accélérer la vaccination consiste à simplifier l’accès à la vaccination en multipliant les lieux de vaccination, en diversifiant les vaccinateurs et en étant au plus près de la population à vacciner. Raison pour laquelle la HAS avait déjà recommandé que les sages-femmes et les pharmaciens puissent prescrire et administrer le vaccin AstraZeneca. Dans la continuité de cet avis, la HAS se prononce aujourd'hui en faveur de l’extension des compétences vaccinales des pharmaciens, des sages-femmes et des infirmiers pour l’ensemble des vaccins contre la Covid-19 incluant les vaccins à ARNm.
Ainsi, la HAS recommande d’une part que la prescription puisse être faite :
- par les pharmaciens, sauf chez les femmes enceintes, et les personnes présentant un trouble de l’hémostase (les personnes sous traitement anti-coagulant ne sont pas concernées par cette restriction).
- par les sages-femmes chez la femme, en particulier la femme enceinte, et dans l’entourage de celle-ci et de son enfant.
La HAS recommande toutefois de favoriser, à ce stade de la campagne vaccinale, la prescription par les médecins compte tenu d’une disponibilité encore limitée des vaccins contre la Covid-19 et afin de continuer à prioriser la vaccination des personnes les plus à risque de formes sévères.
D’autre part, la HAS recommande que l’administration des vaccins à ARNm comme ceux à vecteur viral puisse être réalisée par les infirmiers, les sages-femmes et par les pharmaciens (ces derniers devant être formés et avoir déclaré une activité de vaccination auprès de leur ARS).
Enfin, le contexte de crise sanitaire et les difficultés d’approvisionnement en vaccins ne doivent pas engendrer d’inégalité d’accès à la vaccination. Pour la HAS, il est primordial dans cet objectif, de mettre en place ou d’amplifier des dispositifs permettant d’aller vers les personnes isolées à domicile, en incapacité de se rendre dans les centres de vaccinations ou les établissements hospitaliers, ainsi que vers les personnes précaires ou vivant dans des zones territoriales défavorisées et confrontées à des freins dans l’accès aux soins en général, et à la vaccination contre la Covid-19 en particulier. Parmi les dispositifs possibles ou existants, la HAS recommande par exemple le déploiement d’équipes mobiles.
Les recommandations de la HAS seront mises à jour en fonction de l’évolution des connaissances, des nouvelles données disponibles et de l’approvisionnement en doses de vaccins.
[1] Le diabète (de type 1 et de type 2), ; et pour lequel il apparaît que le risque associé pourrait être plus élevé chez les diabétiques plus jeunes ; l’obésité (IMC > 30 kg/m2), ce risque augmente avec l’IMC (IMC > 40 kg/m2) et pourrait être plus élevé chez les plus jeunes ; les cancers en particulier s’il s’agit d’un cancer récent et/ou en progression et/ou sous chimiothérapie, les personnes atteintes de cancers hématologiques semblent plus à risque encore ; la BPCO et l’insuffisance respiratoire, l’insuffisance cardiaque, l’hypertension artérielle compliquée.
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