ENERZAIR BREEZHALER (acétate d’indacatérol/ bromure de glycopyrronium/ furoate de mométasone)

Avis sur les Médicaments - Mis en ligne le 16 mars 2021

Nature de la demande

Réévaluation suite saisine Ministères

Réévaluation.

Avis favorable au remboursement dans le traitement continu de l’asthme chez les adultes, insuffisamment contrôlés par un traitement continu associant une dose forte de corticoïde inhalé et un bêta 2 agoniste de longue durée d’action, qui ont présenté une ou plusieurs exacerbations de l’asthme au cours de l’année précédente.

Quel progrès ?

Pas de progrès dans la prise en charge.   

 Quelle place dans la stratégie thérapeutique ?

L’objectif principal de la prise en charge pharmacologique de l’asthme chez les adultes et les adolescents réside dans le maintien durable d’un contrôle de la maladie, incluant la réduction des symptômes, la prévention des crises d’asthme et des exacerbations, la réduction de l’impact de la maladie sur la vie quotidienne, tout en limitant les effets indésirables dus aux traitements pharmacologiques.

La prise en charge thérapeutique repose principalement sur deux types de médicaments visant à agir sur le bronchospasme d’une part, et sur l’inflammation sous-jacente d’autre part. On distingue traditionnellement :

  • les traitements de la crise : les bronchodilatateurs bêta-2 agonistes inhalés de courte durée d’action (SABA). Ces traitements ont été initialement utilisés seuls ; cependant la stratégie combinant un bêta-2 agoniste inhalé de longue durée d’action (LABA) mais de court délai d’action (formotérol) à un corticoïde inhalé est maintenant également recommandée ;
  • les traitements de fond : les corticostéroïdes inhalés (CSI) en monothérapie ou en association à un bronchodilatateur bêta-2 agoniste de longue durée d’action (LABA). D’autres médicaments ont une place limitée, soit du fait de la modicité de leur taille d’effet (les antagonistes des récepteurs des leucotriènes (montélukast), soit du fait de leur faible marge thérapeutique (la théophylline à libération prolongée). Les formes d’asthme les plus sévères peuvent nécessiter une biothérapie (en fonction du phénotype de la pathologie), et/ou une corticothérapie orale.

Cette dichotomie thérapeutique est actuellement en train de s’estomper, dans la mesure où il a été montré que le traitement de la crise par une association de formotérol (LABA) et de corticoïde inhalé permet une diminution des exacerbations sévères.

La prise en charge thérapeutique est adaptée à la sévérité de la maladie. Les consensus internationaux ont individualisé 5 paliers de sévérité avec une escalade thérapeutique en cas de non-contrôle ou de contrôle partiel de l’asthme. La stratégie d’adaptation des traitements est définie par le GINA (Global Strategy for Asthma Management and Prevention).

L’asthme sévère correspond aux paliers 4 et 5 :

  • palier 4 : asthme nécessitant le recours à un traitement de fond par une association de CSI à dose modérée et de LABA (traitement de fond préférentiel) ;
  • palier 5 : asthme de palier 4 non contrôlé nécessitant le recours à un traitement de fond par une association de CSI à dose forte et de LABA, avec au besoin l’adjonction d’un LAMA (tiotropium) ou d’un traitement biologique en fonction du phénotype de l’asthme.

Dans tous ces cas, le traitement de la crise à privilégier est celui d’une association formotérol/corticoïde inhalé de faible dose.

Avant de conclure à un asthme non contrôlé impliquant une éventuelle escalade thérapeutique, il convient d’éliminer un diagnostic différentiel, d’évaluer l’observance du traitement, de vérifier et de corriger éventuellement la technique d’inhalation, de rechercher et traiter les facteurs aggravants (tabac, allergènes domestiques, environnement professionnel…) et les pathologies associées.

Les patients insuffisamment contrôlés avec un traitement de fond par une association CSI /LABA à dose forte au palier 5 du GINA ont les options de traitement suivantes, en plus d'optimiser l'observance du traitement et la modification des facteurs de risque :

  • augmentation de la dose de CSI ;
  • ajout d’un LAMA ;
  • corticothérapie orale ;
  • ajout d’une biothérapie selon le phénotype.

Au palier 5, il est important de pouvoir moduler les doses de CSI en fonction des besoins du patient.

On utilise alors les différents dosages des associations CSI/LABA.

Place du médicament

ENERZAIR BREEZHALER est une triple association fixe de :

  • un corticoïde inhalé (CSI) : le furoate de mométasone,
  • un bêta-2 agoniste de longue durée d’action (LABA) : l’acétate d’indacatérol,
  • et d’un bronchodilatateur anticholinergique de longue durée d’action (LAMA) : le bromure de glycopyrronium.

Ce médicament est une alternative thérapeutique chez les adultes avec un asthme sévère, au palier 5 selon la classification GINA, insuffisamment contrôlés par un traitement continu associant une dose forte de CSI et un LABA, et qui ont présenté une ou plusieurs exacerbations de l’asthme au cours de l’année précédente.

La Commission rappelle qu’ENERZAIR BREEZHALER contient une forte dose fixe de corticoïde (160 µg), ce qui a plusieurs conséquences :

  • ENERZAIR BREEZHALER ne permet pas d’ajuster le traitement du patient pour rechercher la dose de CSI minimale efficace. Dans le cas où une baisse de dose de CSI est à envisager, une association libre de CSI/LABA/LAMA devra être utilisée.
  • le traitement des symptômes chez les patients traités par ce médicament ne pourra faire appel qu’à un bêta 2 agoniste de courte durée d’action, ce qui n’est pas l’option préférentielle au palier 5. Pour rappel, l’option préférentielle de prise en charge des patients au palier 5 repose sur la stratégie dite « SMART » (Single Maintenance And Reliever Therapy), qui permet un traitement de fond et des symptômes à l’aide de la même association (faible dose de CSI + formotérol), dont l’efficacité a été démontrée sur les exacerbations.

Recommandations particulières

Il ressort des dispositions de l’article L. 162-17 du code de la sécurité sociale concernant la liste des médicaments remboursables aux assurés sociaux et des dispositions de l’article L. 5123-2 du code de la santé publique concernant la liste des médicaments agréés aux collectivités publique que la Commission  peut,  au  regard  des  exigences  de  qualité  et  de  sécurité  des  soins  relatives  au médicament qu’elle évalue, énoncer des recommandations qui peuvent  notamment  porter  sur  la qualification ou la compétence des prescripteurs.

En application de ces dispositions, le bon usage d’un médicament chez des patients à un stade avancé de la maladie, dont la prise en charge est difficile, peut nécessiter un encadrement particulier de la prescription du médicament.

La Commission rappelle que les patients éligibles à ENERZAIR BREEZHALER ont un asthme sévère (palier 5), insuffisamment contrôlé, avec des symptômes respiratoires permanents, très invalidants et nécessitent parfois un recours aux soins d’urgence. D’une part, la survenue répétée d’exacerbations peut engager le pronostic vital. D’autre part, la persistance de l’obstruction bronchique (VEMS/CVF < 70%) peut induire un remodelage bronchique et conduire à la dégradation progressive de la fonction respiratoire. La réduction du nombre d’exacerbations est donc un enjeu majeur à la fois à court et à long terme afin de préserver au mieux la fonction respiratoire.

De plus, ces patients nécessitent une prise en charge optimisée impliquant :

  • de confirmer le diagnostic d’asthme sévère et d’éliminer un diagnostic différentiel via une exploration exhaustive ;
  • d’évaluer l’observance du traitement, celle-ci constituant un des piliers du contrôle de l’asthme et notamment des exacerbations ; l’adhérence à un traitement de contrôle de l’asthme à long terme est faible en vie réelle (moins de 60 %) ;
  • de vérifier et de corriger la technique d’inhalation dans les cas où celle-ci n’est pas bonne, une éducation thérapeutique suffisante étant un élément essentiel dans la prise en charge ;
  • de rechercher et traiter les facteurs aggravants (tabac, allergènes ou toxiques domestiques, environnement professionnel…) et les pathologies associées ;
  • et d’adapter le choix du médicament dans un contexte où ENERZAIR BREEZHALER présente des spécificités en raison notamment de sa dose fixe élevée de corticoïdes (cf. stratégie thérapeutique).

Enfin, la prise en charge de ces patients sévères nécessite parfois l’utilisation de corticostéroïdes systémiques pendant une période de durée significative, et il convient d’évaluer régulièrement et précisément leur intérêt au regard des effets indésirables de ces traitements au long cours, tout en recherchant la dose minimale efficace.

Compte tenu de ces éléments, la Commission recommande que la prescription initiale d’ENERZAIR BREEZHALER soit réalisée en concertation avec un pneumologue.


Service Médical Rendu (SMR)

Modéré

Le service médical rendu par ENERZAIR BREEZHALER est modéré dans l’indication de l’AMM.


Amélioration du service médical rendu (ASMR)

V (absence)

Compte tenu :

  • de la démonstration de la supériorité de l’association fixe triple indacatérol/glycopyrronium/mométasone (150/50/160 µg), comparativement à une bithérapie CSI/LABA (mométasone/indacatérol) à forte dose sur la fonction pulmonaire évaluée par le VEMS résiduel à 26 semaines,mais prenant en compte :
    • le choix peu pertinent du comparateur de l’étude qui est approuvé pour des stades moins avancés que ceux ciblés par cette trithérapie,
    • la faible pertinence clinique de la quantité d’effet sur le VEMS à 26 semaines (différence observée de +65 mL), et l’absence de différence significative sur le contrôle de l’asthme (évalué sur l’ACQ-7 à 26 semaines) par rapport à la bithérapie indacatérol/mométasone (150/320 µg),
    • l'absence de démonstration robuste d’une efficacité sur les exacerbations, ce critère ayant été évalué de façon exploratoire (critère secondaire non hiérarchisé) dans l’étude de supériorité ;
  • de la démonstration de la non-infériorité par rapport à la triple association libre salmétérol/fluticasone (50 / 500 µg), 2 fois par jour, + tiotropium (5 µg), 1 fois par jour, sur la variation du score de qualité de vie AQLQ après 24 semaines de traitement, dans une étude en ouvert ce qui en limite la pertinence ;
  • du besoin médical partiellement couvert par les alternatives existantes ;

la Commission de la Transparence considère qu’ENERZAIR BREEZHALER n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) dans le traitement continu de l’asthme chez les adultes, insuffisamment contrôlés par un traitement continu associant une dose forte de CSI et un LABA, qui ont présenté une ou plusieurs exacerbations de l’asthme au cours de l’année précédente.


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