HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) - Hémophilie B
Nature de la demande
Primo-inscription.
L'essentiel
Avis favorable au remboursement dans l’indication de l’AMM.
Quel progrès ?
Un progrès dans la stratégie de prise en charge.
Quelle place dans la stratégie thérapeutique ?
HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) constitue une alternative au traitement conventionnel substitutif par concentrés de facteur IX dans la prise en charge des patients atteintes d’une forme sévère à modérément sévère hémophiles B sans antécédents d’inhibiteurs de FIX. A noter qu’il n’existe pas de définition consensuelle de l’hémophilie B « modérément sévère ». En pratique, on peut considérer qu'il s'agit d'une forme d’hémophilie biologiquement modérée (taux de FIX compris entre 1 et 5%) associée à un phénotype hémorragique sévère (avis d’expert).
Contrairement aux concentrés de FIX, on dispose à ce jour d’un faible recul d’utilisation pour cette première thérapie génique, avec des données disponibles à 2 ans post-administration pour 54 patients et à 3 ans pour 3 autres patients. Ce traitement a permis pour la grande majorité des patients inclus dans l’étude pivot ne pas reprendre de prophylaxie au long cours par FIX (96% à 2 ans), avec néanmoins une variabilité individuelle de la réponse notamment en termes de taux de FIX atteint (variant entre 4,7% et 99,2%).
Conformément au résumé des caractéristiques du produit (RCP), HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) :
- Ne doit être administré qu’à des patients pour lesquels l’absence d’inhibiteurs du facteur IX a été démontrée.
- Est contre-indiqué chez les patients présentant des infections hépatiques aiguës ou chroniques non contrôlées ou chez ceux atteints d’une fibrose hépatique avancée ou d’une cirrhose connues, et non recommandé chez les patients souffrant d’autres troubles hépatiques.
La Commission souligne également qu’à ce jour HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) n’a pas été évalué chez les patients ayant un taux de FIX endogène supérieur à 2%. De plus, les données cliniques disponibles indiquent que des anticorps préexistants neutralisants anti-AAV5 supérieurs à un titre de 1 :678 peuvent réduire l’efficacité du traitement. Pour le seul patient avec un titre d’anticorps supérieur à 1 :678 (titre 1 :3212) dans l’étude de phase III, aucune expression du facteur IX n’a été observée et une reprise de la prophylaxie par facteur IX exogène a été nécessaire.
L’administration de ce traitement doit s’accompagner d’une surveillance régulière de l’activité du facteur IX, visant à contrôler la réponse au traitement, et de l’hépatotoxicité (cf. RCP). Eu égard au cas de carcinome hépatocellulaire survenu 12 mois après l’administration d’HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) dans l’étude de phase III, sans que l’on puisse à ce jour écarter tout lien avec le traitement, la Commission recommande une surveillance hépatique renforcée pour tous les patients traités, avec un dépistage semestriel prolongé incluant notamment une échographie hépatique.
Considérant les incertitudes (en matière de maintien de l’efficacité et de tolérance), la Commission préconise que la décision de traitement par HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) :
- soit prise lors de réunions de concertation pluridisciplinaires, incluant un hépatologue, au sein des centres de référence et de compétence de l’hémophilie et/ou des troubles hémorragiques,
- repose sur une décision médicale partagée entre le professionnel de santé et le patient.
Ainsi, avant toute prise de décision, la Commission souligne la nécessité pour les patients et les aidants d’avoir accès à une information claire pour comprendre les avantages et les risques de la thérapie génique, en particulier :
- Les incertitudes sur le maintien de l’efficacité à moyen et long terme,
- Les incertitudes sur la tolérance dont le risque potentiel de cancer, en particulier celui de carcinome hépatocellulaire, dans un contexte où le recul maximal de suivi est de 3 ans, mais seulement pour 3 patients,
- Que ce traitement requiert une surveillance régulière, notamment des tests sanguins, visant à contrôler la réponse au traitement et à évaluer le bilan hépatique,
- Que des corticoïdes devront être administrés, dans certains cas, en cas d’atteintes hépatiques provoquées par ce médicament, et que le patients sera alors exposé aux événements indésirables de ces traitements en plus de ceux liés à HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec),
- Qu’une immunité préexistante importante contre le vecteur AAV5 peut réduire l’efficacité du traitement,
- Que certains patients peuvent ne pas répondre au traitement, mais qu’ils restent exposés aux risques à long terme,
- Qu’à ce jour on ignore encore si, ou dans quelles conditions, le traitement peut être répété, et dans quelle mesure les anticorps endogènes préexistants pourraient interagir par réaction croisée avec les capsides des vecteurs AAV utilisés dans d’autres thérapies géniques et potentiellement affecter leur efficacité,
- Les patients traités en âge de procréer et leurs partenaires de sexe féminin en âge de procréer doivent éviter ou différer toute grossesse en utilisant une contraception mécanique pendant les 12 mois qui suivent l’administration.
De plus, la Commission rappelle qu’avant toute administration du traitement et conformément au RCP :
- Le titre d’anticorps neutralisants anti-AAV5 préexistants doit être évalué,
- Les transaminases hépatiques du patient doivent être évaluées et une échographie et une élastographie hépatiques doivent être effectuées. L’évaluation du bilan hépatique de base doit être réalisée selon une approche pluridisciplinaire avec l’implication d’un hépatologue afin d’adapter au mieux la surveillance en fonction de l’état du patient : les transaminases hépatiques du patient doivent être évaluées et une échographie et une élastographie hépatiques doivent être réalisées au plus tard dans les 6 mois.
Tous les patients traités par HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) devront être inclus dans un registre français et suivis à long terme afin de mieux connaitre son profil de tolérance et d’efficacité à long terme (cf. paragraphe 5.6 Demande de données).
Recommandations particulières
- Autres recommandations
Considérant les incertitudes (en matière de maintien de l’efficacité et de tolérance), la Commission préconise que la décision de traitement par HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) :
- soit prise lors de réunions de concertation pluridisciplinaires, incluant un hépatologue, au sein des centres de référence et de compétence de l’hémophilie et/ou des troubles hémorragiques,
- repose sur une décision médicale partagée entre le professionnel de santé et le patient.
Ainsi, avant toute prise de décision, la Commission souligne la nécessité pour les patients et les aidants d’avoir accès à une information claire pour comprendre les avantages et les risques de la thérapie génique.
La Commission recommande qu’une surveillance hépatique renforcée soit mise en place chez tous les patients avec un dépistage de carcinome hépatocellulaire semestriel prolongé incluant une échographie.
Service Médical Rendu (SMR)
Important |
Le service médical rendu par HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) est important dans le traitement de l’hémophilie B (déficit congénital en facteur IX) sévère et modérément sévère chez les patients adultes sans antécédents d’inhibiteurs du facteur IX. |
Amélioration du service médical rendu (ASMR)
IV (mineur) |
Compte tenu :
mais au regard des nombreuses incertitudes portant notamment sur :
la Commission considère que HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) apporte une amélioration du service médical rendu mineure (ASMR IV) par rapport à la prophylaxie par concentrés de facteur IX. |
Avis économique
Ce produit a fait l'objet d'un avis économique rendu par la Commission d'évaluation économique et de santé publique le 6/02/2024.
La Commission évaluation économique et de santé publique conclut que :
- l’analyse déposée par l’industriel ne permet pas de démontrer l’efficience d’HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) dans le traitement des patients adultes atteints d’hémophilie B sévère et modérément sévère sans antécédent d’inhibiteurs du FIX et préalablement traités en prophylaxie, en raison d’une incertitude globale majeure, qui rend les résultats ininterprétables ;
- les principales sources d’incertitude sont relatives à la durabilité de l’effet du traitement sur un horizon temporel de 20 ans, à l’estimation des coûts des traitements prophylactiques par concentré de FIX, et au gain de QALY ;
- au prix revendiqué pour une injection unique et selon les choix et hypothèses de l’industriel, l’introduction d’HEMGENIX (etranacogene dezaparvovec) génère une augmentation de 63% des dépenses de l’Assurance Maladie sur 5 ans, portée à 68% par l’acquisition du traitement pour une population cible annuelle s’élevant à terme à 304 patients ;
- cet impact budgétaire est toutefois empreint d’une incertitude, générée notamment par les estimations des coûts d’acquisition des traitements prophylactiques par FIX et de la population rejointe attendue en pratique courante française.
> HEMGENIX - Avis économique (pdf)