Réévaluation de la stratégie de dépistage de l’infection à VIH en France

Public Health guideline - Posted on Mar 24 2017

La stratégie de dépistage de l’infection à VIH en France a fait l’objet de recommandations publiées par la Haute Autorité de santé (HAS) en 2009. Celles-ci mettaient l’accent sur la proposition d’un test de dépistage à l’ensemble de la population générale âgée de 15 à 70 ans « au moins une fois dans la vie » lors d’un recours aux soins, en dehors de toute notion d’exposition à un risque de contamination par le VIH. Elles préconisaient aussi le renforcement d’un dépistage ciblé et régulier pour les populations les plus exposées, soit les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) multipartenaires, les utilisateurs de drogues par injection (UDI) et les personnes multipartenaires originaires d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes.

Au regard des nouvelles données épidémiologiques et de celles portant sur le recours au dépistage de l’infection à VIH depuis 2009, et à la demande de la Direction générale de la santé, la HAS réévalue cette stratégie de dépistage.

 

Texte issu de la synthèse de la recommandation

Principales recommandations

Le dépistage de l’infection à VIH est un élément clé du contrôle de l’épidémie qui s’intègre dans une démarche préven­tive globale. Il doit être orienté vers des populations prioritaires, définies en fonction des données épidémiologiques, et s’appuyer sur les outils de prévention et de traitement efficaces, les différents types de tests de dépistage disponibles et les multiples acteurs présents sur le territoire.

Messages-clés

La priorité doit être accordée au dépistage de l’infection à VIH au sein des populations clés. Il convient ainsi de renforcer la fréquence du dépistage dans ces populations :

  • tous les 3 mois chez les HSH ;
  • tous les ans chez les UDI ;
  • tous les ans chez les personnes originaires de zones de forte prévalence de l’infection à VIH, notamment d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes.

Afin de permettre le diagnostic des personnes qui ignorent leur séropositivité et de réduire l’épidémie cachée, la proposi­tion d’un test de dépistage de l’infection à VIH au moins une fois au cours de la vie entre 15 et 70 ans doit être maintenue et représente une approche complémentaire au dépistage au sein des populations clés.

Cette proposition de dépistage doit être principalement orientée en fonction de l’incidence de l’infection à VIH et de la prévalence de l’infection non diagnostiquée plus élevées dans certaines régions (IDF, PACA, DFA), ainsi que chez les hommes, qui ont un moindre recours au système de soins que les femmes.

Un test de dépistage de l’infection à VIH doit par ailleurs être systématiquement proposé dans différentes circonstances : diagnostic d’une IST, d’une hépatite B ou C, diagnostic de tuberculose, grossesse ou projet de grossesse, viol, prescrip­tion d’une contraception ou IVG, incarcération.

La démarche individuelle et volontaire de recours au dépistage de l’infection à VIH doit continuer d’être encouragée et facilitée. 

La HAS considère par ailleurs que la recherche de l’infection à VIH peut être facilitée par la proposition conjointe de tests de dépistage de l’infection à VHB et VHC en fonction des facteurs de risque, inscrivant cette démarche dans une approche plus globale de santé sexuelle.

 
Il est rappelé que les professionnels de santé doivent toujours être attentifs aux symptômes de primo-infection à VIH, d’infections opportunistes ou d’autres maladies « indicatrices » du VIH, et proposer systématiquement la prescription d’un test de dépistage de l’infection à VIH dans ces circonstances. De la même manière, un test de dépistage de l’infection à VIH doit être systématiquement prescrit en cas d’exposition à haut risque sexuel / sanguin ou professionnel.
 

Populations visées par le dépistage de l’infection à VIH

Les populations clés les plus exposées au risque d’infection à VIH sont les HSH, les personnes originaires de zones de forte prévalence de l’infection, notamment d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes, et les UDI.

La fréquence du dépistage auprès de ces populations clés doit être augmentée et inscrite dans la durée. Les résul­tats de la modélisation économique menée, réévaluant l’efficience des différentes stratégies de dépistage de l’infection à VIH en France, confortent l’importance de l’augmentation de cette fréquence de dépistage, dans l’objectif notamment d’améliorer l’espérance de vie des patients vivant avec le VIH.

 

L’infection à VIH : une épidémie concentrée

L’infection à VIH touche de manière disproportionnée certains groupes de la population française.

Les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) :

  • en 2013, 45 % des nouvelles infections ont été mises en évidence dans cette population ;
  • l’incidence y est particulièrement élevée avec un taux 200 fois supérieur à celui de la population hétérosexuelle née en France métropolitaine.

Les utilisateurs de drogues par injection (UDI) :

  • en 2013, le nombre de nouvelles infections reste relativement faible chez les UDI (environ 100 nouvelles infections par an) ;
  • mais le taux d’incidence est 20 fois plus élevé que celui de la population hétérosexuelle née en France métropolitaine.

Les personnes originaires d’Afrique subsaharienne et des Caraïbes :

  • en 2013, 23  % des nouvelles infections ont été mises en évidence chez les femmes hétérosexuelles nées hors de France et 16  % chez les hommes hétérosexuels nés hors de France (et principalement dans un pays d’Afrique sub­saharienne) ;
  • le taux d’incidence est 70 fois plus élevé chez les femmes et 30 fois plus élevé chez les hommes hétérosexuels origi­naires d’Afrique subsaharienne que dans la population hétérosexuelle née en France métropolitaine.
 
L’infection à VIH est caractérisée par le maintien d’une « épidémie cachée », c’est-à-dire d’un nombre de personnes qui ignorent leur séropositivité. Ces infections à VIH non diagnostiquées concernent principalement les populations clés au sein de la population générale et contribuent de manière significative à la transmission du VIH.

 

L’infection à VIH : importance d’une « épidémie cachée »

Retard au diagnostic en 2014 : 4 diagnostics sur 10

  • 40 % des individus découvrent leur séropositivité à un stade tardif (sida ou CD4 ≤ 200/mm3).
  • Des délais toujours longs entre infection et diagnostic (3,3 ans en médiane) : les délais sont plus longs chez les hommes hétérosexuels, qu’ils soient nés en France ou hors de France (délai médian de 4,4 ans environ), que chez les femmes hétérosexuelles et les HSH (délai médian de 2,9 ans environ).         

24 800 personnes ignoraient leur séropositivité pour le VIH en 2013 : la répartition géographique et par population clé des personnes ignorant leur séropositivité apparaît similaire à celle des nouvelles infections.

 

Au sein de la population générale française, des individus ou groupes d’individus ont un recours moindre au système de soins ou se trouvent dans des régions dans lesquelles l’incidence de l’infection à VIH est plus élevée que la moyenne nationale.

La proposition d’un test de dépistage en population générale doit ainsi être principalement orientée en fonction de ces spécificités identifiées.

 

Prise en compte des spécificités territoriales et démographiques de l’infection à VIH

Les hommes, quel que soit leur âge :

  • en 2013, ils représentent 73 % des personnes vivant avec le VIH non diagnostiquées ;
  • ils présentent une incidence près de 2 fois plus élevée que celle des femmes, mais ont une activité de dépistage près de 2 fois moins importante que celle des femmes ;
  • en 2013, 70 % des nouvelles infections ont été mises en évidence chez les hommes (dont 2/3 chez les HSH).

Certaines régions françaises :

  • en 2013, sur les 7 100 nouvelles infections, plus de 50 % sont survenues dans 3 régions (Ile-de-France, Provence-Alpes-Côte d’Azur et, dans une moindre mesure, Rhône-Alpes) ;
  • en 2013, sur les 24 800 personnes ignorant leur séropositivité, plus de 50 % vivaient dans ces 3 mêmes régions ;
  • dans les départements français d’Amérique (DFA), le nombre de personnes ignorant leur séropositivité ne diminue pas (66 pour 10 000 habitants en Guyane, 27 pour 10 000 en Guadeloupe et 9 pour 10 000 en Martinique) et le nombre de nouvelles infections à VIH reste très élevé (18 pour 10 000 en Guyane, 7 pour 10 000 en Guadeloupe et 3 pour 10 000 en Martinique).

 

Outils disponibles et acteurs présents sur le territoire français

La diversité des tests proposés − Elisa de 4e génération, test rapide d’orientation diagnostique (TROD), autotest de dépistage de l’infection à VIH (ADVIH) − permet un accès individualisé au dépistage et une adaptation de l’offre aux populations à cibler de façon prioritaire. La combinaison de ces outils est par ailleurs souhaitable dans une démarche régulière de dépistage au sein des populations clés.

Le dépistage de l’infection à VIH peut être réalisé               

  • sur proposition d’un professionnel de santé, quel que soit le recours aux soins (consultation ambulatoire, admission dans un service d’urgences, séjour hospitalier, visite de médecine préventive pour les étudiants) ;
  • dans une structure associative ou un centre gratuit d’information, de dépistage et de diagnostic (CeGIDD) ;
  • dans un laboratoire d’analyses de biologie médicale.

La diversité des acteurs permet de favoriser toutes les occasions de proposition de dépistage, en les coordonnant et en les adaptant aux populations visées.

 

Approche préventive globale de santé sexuelle

Le dépistage de l’infection à VIH doit s’insérer dans une démarche préventive globale intégrant tous les moyens de préven­tion. Celle-ci repose notamment sur une information renouvelée et des messages clairs adaptés aux différents publics : la promotion du préservatif, le traitement post-exposition, le contrôle des infections sexuellement transmissibles, l’utilisation des traitements dans un cadre préventif (prophylaxie pré-exposition* notamment) et la prise en charge globale et rapide des personnes infectées.


 

* La prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIH nécessite un suivi régulier (un mois après le début du traitement puis tous les 3 mois), permettant notamment de réaliser un dépistage du VIH et des autres IST (cf. fiche bon usage du médicament « La prophylaxie pré-exposition (PrEP) au VIH par TRUVADA®»).

 

 

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