Délégation, transfert, nouveaux métiers… Comment favoriser les formes nouvelles de coopération entre professionnels de santé

Recommandation HAS en collaboration avec l'ONDPS
Recommandation en santé publique - Mis en ligne le 16 avr. 2008 - Mis à jour le 22 juil. 2008

Cette recommandation traite des nouvelles formes de coopérations entre professionnels de santé, définies comme une nouvelle répartition de tâches existantes ou la répartition de nouvelles tâches entre professionnels de santé. Leur objectif est d’améliorer la qualité de la prise en charge des patients.

 

Les nouvelles formes de coopération constituent une opportunité d’évolution du système de santé en termes d’attractivité des professions de santé, de qualité de la prise en charge des patients et d’efficience. Cependant, elles se heurtent à des freins importants liés aux modalités de formation et au cadre d’exercice des professions de santé. Des évolutions structurelles apparaissent souhaitables. Cette recommandation propose de favoriser le développement de ces nouvelles formes de coopération dans un objectif d’amélioration de la qualité du système de santé grâce à :

  • la rénovation de l’offre de formation initiale et continue
  • la refondation du cadre juridique de définition des professions, sur la base d’un référentiel de missions et non plus uniquement d’actes prédéterminés ;
  • la valorisation des coopérations à travers la rémunération ou les perspectives de carrière ;
  • la mise en œuvre d’un dispositif d’accompagnement visant à garantir l’intérêt et la qualité des nouvelles formes de coopération.

 

Synthèse

Introduction

Cette recommandation traite des nouvelles formes de coopération entre professionnels de santé, définies comme une nouvelle répartition de tâches existantes ou la répartition de nouvelles tâches entre professionnels de santé. Elle s’inscrit donc dans la problématique générale de l’amélioration de l’organisation des soins.

Dans un contexte où se mêlent l’apparition de nouveaux « besoins » de santé, l’évolution de la demande adressée aux professionnels, des progrès technologiques importants et la diminution annoncée du nombre de médecins, cette question mérite une attention toute particulière.

 Les enjeux des nouvelles formes de coopération sont multiples :

  • L’amélioration de la qualité des soins est recherchée en favorisant le développement de certaines activités (l’éducation thérapeutique par exemple) et/ou la réorganisation de la prise en charge des patients (par exemple pour le suivi des malades chroniques).
  • Si l’on ne peut attendre de ces nouvelles formes de coopération de réduction immédiate des dépenses de santé, en raison notamment des besoins en formation, le maintien, voire l’amélioration, de la qualité de la prise en charge des patients constitue un objectif premier et essentiel en termes d’efficience du système de santé.
  • L’évolution des pratiques grâce aux nouvelles formes de coopération représente un élément clé d’attractivité des professions. Pour les médecins, elles peuvent contribuer à améliorer les conditions d’exercice, en développant l’exercice pluri-professionnel et en leur permettant de privilégier les activités purement médicales. Pour les autres professions de santé, l’accroissement des missions et la reconnaissance de l’évolution des compétences offrent des possibilités d’évolution de carrière autres que les seuls postes d’encadrement.



Des conditions actuelles d’exercice peu propices à une évolution des pratiques

Les conditions de formation initiale des professions de santé créent d’emblée une séparation entre les médecins, dont la formation relève d’une filière universitaire longue (9 à 11 ans), et les professions paramédicales, dont la formation correspond à des filières professionnelles plus courtes (3 ans en moyenne). Il n’existe que peu de passerelles à l’exception de celles mises en place à l’issue de la première année de médecine.

Le cadre juridique de l’exercice des professions médicales et des autres professions de santé est construit en référence aux diplômes et à la notion de « monopole médical ». Le monopole médical est défini comme une exonération légale au principe de protection de l’intégrité corporelle des personnes, c’est-à-dire que seuls les médecins sont autorisés à porter atteinte à cette intégrité. Dans le Code de la santé publique, le périmètre d’exercice des autres professions de santé est défini en dérogation à ce monopole.

Les modes de rémunération des professionnels de santé, tant en ville qu’à l’hôpital, offrent a priori peu de place au développement de nouvelles formes de coopération. En ville, ils sont construits autour de l’exercice individuel et, à l’hôpital public, ils sont déterminés en fonction des statuts plutôt que des missions.

Il est possible de modifier de manière conjoncturelle le cadre existant pour développer les nouvelles formes de coopération au cas par cas. Cette modification peut concerner le domaine juridique (introduction d’un acte dans un décret d’exercice), la formation ou les conditions de financement des soins (création d’un acte dans la nomenclature) mais cette approche est nécessairement limitée à des ajustements ponctuels et sa généralisation en routine nécessiterait de mettre en place un système complexe.

Il apparaît, dès à présent, souhaitable de pérenniser l’activité dérogatoire mise en place dans les sites expérimentateurs, sous réserve que les équipes en fassent la demande officielle auprès du ministère de la Santé et que la HAS et/ou l’ONDPS valident l’expérimentation sur la base de son évaluation.


Pour un cadre rénové créant les conditions favorables au développement des nouvelles formes de coopération

Seule une approche structurelle, qui repose sur la production d’un nouveau cadre de référence professionnel, est à même de répondre de manière cohérente et pérenne aux enjeux de qualité, d’efficience et d’attractivité.

Les travaux nécessaires à la rénovation de l’organisation des professions de santé doivent être initiés le plus rapidement possible avec l’ensemble des partenaires institutionnels et professionnels.

L’élaboration d’un nouveau cadre de référence professionnel passe par la révision fondamentale et simultanée des trois piliers de l’organisation des professions de santé : le système de formation, le cadre juridique et les conditions économiques d’exercice.

Le système de formation des professionnels de santé doit être repensé dans le cadre du dispositif Licence-Master-Doctorat (LMD), selon un continuum de compétences répondant aux besoins de santé publique actuels et à venir, avec en particulier le développement de formations de niveau master et de filières de recherche. Ainsi, il convient de définir des champs prioritaires pour le développement des nouvelles formes de coopération en fonction des besoins ou des priorités de santé publique identifiés par les acteurs concernés (autorités de tutelle, patients et professionnels de santé) ; de construire des référentiels métiers et compétences permettant de répondre aux besoins identifiés ; de développer une offre de formation adaptée aux enjeux.

Le cadre juridique doit dépasser l’approche nécessairement restrictive d’une liste d’actes autorisés par profession pour évoluer vers une logique mixte, définissant également les professions de santé par les missions qui leur sont confiées. À ce titre, il convient de modifier l’article L. 4161-1 du Code de la santé publique. Les nouvelles formes de coopération appellent aussi une évolution des règles déontologiques pour l’ensemble des professions concernées et renforcent le besoin d’une régulation professionnelle organisée.

Les conditions de financement et de rémunération des professionnels de santé doivent inciter au développement des nouvelles formes de coopération. Dans le secteur ambulatoire, il convient d’expérimenter de nouveaux modes de rémunération qui laissent une place à d’autres éléments que le paiement à l’acte. À l’hôpital, si la tarification à l’activité peut constituer un moteur pour le développement des coopérations, il apparaît cependant nécessaire de modifier les règles de rémunération des professionnels paramédicaux dans le secteur public. Enfin, dans ces deux secteurs, il importe de tenir compte des activités liées à la coordination.


Pour un développement des nouvelles formes de coopération qui améliore la qualité du Système de Santé

Les évolutions du cadre d’exercice des professions de santé constituent un socle indispensable pour créer des conditions favorables au développement des nouvelles formes de coopération. La mise en œuvre des nouveaux métiers et des nouveaux rôles professionnels permis par ce cadre doit être accompagnée. La définition des modalités concrètes de développement de ces nouvelles formes de coopération est nécessaire dans un objectif de qualité.

La mise en place de ces nouvelles organisations du travail doit tenir compte des principes définis dans le document de la HAS « Bases méthodologiques pour la réalisation d’un cahier des charges ».

Il convient d’intégrer le développement des nouvelles formes de coopération dans le cadre des réflexions actuelles sur l’organisation des soins, et notamment celles concernant les parcours de soins.

Il est nécessaire d’évaluer l’impact des nouvelles formes de coopération sur l’ensemble du système de santé en termes de qualité des soins et d’efficience

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