Affections podologiques

Certaines chimiothérapies conventionnelles et autres thérapies ciblées provoquent des effets secondaires qui dégradent la qualité de vie des patients. Parmi elles, figurent le syndrome main-pied (atteintes cutanées), l'onycholyse (atteintes unguéales) et la paronychie (atteintes péri-unguéales).
L’orientation du patient chez un pédicure-podologue, avant et pendant le traitement, permet de prévenir et de diminuer les symptômes, de maintenir le traitement anticancéreux au dosage initialement prescrit et de garantir au patient une meilleure qualité de vie.

L’essentiel

  • Avant tout traitement anticancéreux et lors de sa prescription, il est recommandé d'adresser le patient à un pédicure-podologue pour prévenir l’apparition d’un syndrome main-pied.

  • Un examen podologique des patients atteints de cancer en amont de leur traitement est utile pour éviter l’apparition ultérieure d’onycholyses ou de paronychies.

  • L’éducation des patients, avant la mise sous chimiothérapie et lors du traitement anticancéreux, est essentielle pour les aider à repérer les signes précurseurs de potentielles complications (informations sur la manière d'éviter les traumatismes, la nécessité de porter des chaussures confortables, larges et sans talon, d'éviter les bains de pieds prolongés, de préférer les chaussettes en coton et les bas de contention sans couture traumatisante...).

 

Prévenir et diminuer le syndrome main-pied

Lors de chimiothérapies et de thérapies ciblées des réactions cutanées peuvent apparaître. Le syndrome main-pied se caractérise par un érythème palmaire et/ou plantaire symétrique, par une desquamation avec douleur, une paresthésie et une intolérance à la température, en particulier à la chaleur.

L’examen pédicuro-podologique permet de repérer les zones d’hyperkératose et les atteintes unguéales et péri-unguéales ou les paronychies préexistantes. Il est recommandé d’effectuer une gradation du syndrome main-pied selon trois degrés de gravité.

Gradation du syndrome main-pied

Grade 1

Modifications cutanées ou érythèmes minimes sans douleur ni retentissement sur les activités quotidiennes du patient : fourmillements, sensation déplaisante au toucher, sensation de brûlures, picotements, gonflements, rougeurs.

Grade 2

Modifications cutanées ou érythèmes avec douleurs, mais sans retentissement sur les activités quotidiennes du patient : rougeurs, gonflements, bulles, œdèmes.

Grade 3

Modifications cutanées ou érythèmes ulcérés avec douleurs entraînant une gêne fonctionnelle : épaississement (hyperkératose) et desquamation de la peau, bulles, douleurs sévères, incapacité du patient à effectuer ses activités quotidiennes.

 

Traitement podologique du syndrome main-pied

Avant un traitement anticancéreux et lors du traitement, une consultation chez un pédicure-podologue est nécessaire car elle permet de prévenir et diminuer un syndrome main-pied, de maintenir le traitement anticancéreux au dosage initialement prescrit et de garantir une meilleure qualité de vie au patient.

Avant un traitement anticancéreux et lors de sa prescription, le pédicure-podologue traite les zones d’hyperkératoses préexistantes. Cependant, en cas d’inflammation, les actions mécaniques sont déconseillées. Des crèmes kératolytiques (à base d’urée) sont alors privilégiées plutôt que les actions mécaniques à l’aide d’un bistouri, d’une turbine, d’un micromoteur ou de gouges.

Le pédicure-podologue réalise également un bilan diagnostique podologique pour concevoir des orthèses plantaires qui serviront à limiter la formation des hyperkératoses (mise en décharge des zones douloureuses et/ou d'hyper appuis) et prescrit une crème émolliente de type émulsion à appliquer régulièrement après l’ablation des hyperkératoses.

Les soins de pédicurie sont réalisés pendant les semaines de pause du traitement.

Il est essentiel de mettre en place un suivi régulier du patient afin de surveiller l’évolution des symptômes après le début de la chimiothérapie et/ou du traitement ciblé.

 

Prévenir les onycholyses (atteintes unguéales)

L’onycholyse est l’un des effets attendus de certaines chimiothérapies conventionnelles, notamment celles utilisant des taxanes (docetaxel, paclitaxel, etc.).

Dans ses grades les plus sévères, l’onycholyse peut affecter la qualité de vie du patient sous traitement anticancéreux et avoir une répercussion sur le traitement : réduction du traitement anticancéreux, suspension temporaire, voire même changement de molécule.

Lors d’une consultation précédant un traitement par chimiothérapie ou une thérapie ciblée, le pédicure-podologue prend en charge les ongles du patient. Il réalise une coupe harmonieuse et un fraisage homogène des ongles.

Le professionnel de santé informera son patient sur les soins unguéaux que ce dernier peut réaliser lui-même à son domicile : appliquer le vernis prescrit par l’équipe spécialisée, régulièrement, se couper les ongles et hydrater la tablette, la cuticule et les bords latéraux des ongles, se laver les ongles à l’eau et au savon et éviter les dissolvants avec acétone, limiter les immersions dans l’eau. L’utilisation d’un antiseptique est recommandée.

Dans le cas d’un décollement de la tablette unguéale, il est recommandé d’effectuer une gradation de l’onycholyse selon la classification du National Cancer Institute – Common Terminology Criteria for Adverse Events (NCI-CTCAE).

Gradation de l’onycholyse

Grade 1 Séparation du lit et de la plaque de l’ongle ou chute de l’ongle asymptomatique.
Grade 2  Séparation du lit et de la plaque de l’ongle ou chute de l’ongle asymptomatique avec perturbation de l’autonomie de la vie quotidienne. 

Prévenir l’apparition des paronychies

La paronychie se caractérise par une inflammation du pourtour de l’ongle avec la présence d’un bourgeon charnu saignant associé à un ongle fragilisé.
Avant de débuter toute thérapie anticancéreuse ciblée par des anticorps anti-epidermal growth factor receptor (anti-EGFR), une consultation chez le pédicure-podologue est nécessaire pour prévenir l’apparition de paronychies.

Dans le cas d’atteinte péri-unguéale, comme pour l’onycholyse, il est recommandé de grader les atteintes selon la classification du NCI-CTCAE.

Gradation de la paronychie

Grade 1 Inflammation du pourtour de l’ongle, atteinte de la cuticule.
Grade 2 

Inflammation du pourtour péri-unguéal avec douleur mais sans perturbation de l’autonomie de la vie quotidienne.

Grade 3 

Inflammation du pourtour péri-unguéal avec douleur et perturbation de l’autonomie de la vie quotidienne.

 

Dans le cas d’une consultation en amont d’un traitement par des anticorps (anti-EGFR), le pédicure-podologue réalise une coupe harmonieuse des ongles du patient.
Les soins podologiques instrumentaux sont réalisés durant les semaines de pause du traitement

L’utilisation d’un antiseptique pourra parfois être proposée. En cas de surinfection avec abcès péri-unguéal, le pédicure-podologue informe le médecin traitant ou l’oncologue du patient.

Le suivi régulier du patient dans les semaines qui suivent le début du traitement est recommandé afin de surveiller l’évolution des symptômes.

 

Rédaction Arielle Fontaine (HAS) & Citizen press