Stratégie de vaccination contre la Covid-19 - Place du vaccin Covid-19 Janssen
Le vaccin Covid-19 Janssen a obtenu le 11 mars 2021 une autorisation de mise sur le marché (AMM) conditionnelle en Europe (procédure centralisée). Il est indiqué pour l'immunisation active afin de prévenir la Covid-19 causée par le SARS-CoV-2 chez les personnes âgées de 18 ans et plus.
A qui s’adresse ces recommandations ?
Elles s’adressent à :
- Aux pouvoirs publics
Quels sont les objectifs de cette recommandation ?
Dans la continuité des travaux déjà menés sur la stratégie de vaccination contre le SARS-CoV-2 et à la demande du ministère chargé de la Santé, la HAS en s’appuyant sur la commission technique des vaccinations, détermine la place du vaccin Covid-19 Janssen dans la stratégie vaccinale actuelle contre la Covid-19.
Principaux éléments pris en considération :
La HAS a pris en considération les éléments suivants :
- Les caractéristiques de ce vaccin, utilisant comme plateforme le vecteur viral non réplicatif de l’adénovirus 26 (Ad26) qui permet d’induire une réponse immunitaire robuste et durable dirigée contre la protéine S. Ce vaccin est administré en une seule dose par voie intramusculaire (IM) et se présente sous forme de flacon multidoses prêt à l’emploi pouvant être conservé jusqu’à 3 mois au réfrigérateur entre 2 et 8°C après décongélation ;
- L’efficacité du vaccin Covid-19 Janssen contre les formes modérées à sévères/critiques de Covid-19 survenant à partir de 14 jours (66,9 % [59,03 ; 73,40]) ou de 28 jours (66,1 % |55,01 ; 74,80]) après la vaccination, y compris chez les participants âgés de 65 ans et plus, et globalement chez les participants atteints de comorbidités ayant un risque accru de complications de la Covid-19 sans qu’il soit possible de faire de distinction d’efficacité en fonction des différents types de comorbidités ;
- L’efficacité vaccinale constatée environ à partir de 14 jours après la vaccination, augmentant jusqu’à 8 semaines après la vaccination, puis persistant au-delà, sans que la durée de protection puisse être estimée à ce stade (suivi médian de 8 semaines) ;
- L’efficacité plus élevée observée à partir de 14 jours après la vaccination sur les formes sévères/critiques (76,7 % [54,56 ; 89,09] et sur les formes ayant nécessité une hospitalisation (93,1 % [72,74 ; 99,20]) ;
- Les niveaux d’efficacité en fonction des différentes régions du monde (États-Unis, Afrique du Sud, Amérique latine) globalement proches de ceux observés dans la population totale d’analyse, en particulier sur les formes sévères/critiques de la Covid-19, suggérant que les niveaux d’efficacité sont proches selon les variants sud-africains et brésiliens, mais ne permettent pas d’estimer l’efficacité contre le variant B.1.1.7 qui a émergé au Royaume-Uni ;
- Les premiers résultats très encourageants des analyses exploratoires sur les infections asymptomatiques par le SARS-CoV-2 survenues à partir de 29 jours après la vaccination montrant une efficacité du vaccin comparable à celle observée sur les formes symptomatiques ;
- L’absence de données chez les personnes atteintes de maladies graves ou non équilibrées, les femmes enceintes, les personnes de moins de 18 ans, les personnes immunodéprimées et l’absence de données de comparaison directe par rapport autres vaccins contre la Covid-19 ;
- Le profil de tolérance à court terme globalement satisfaisant du vaccin Covid-19 Janssen.
Principales recommandations :
La HAS conclut à une efficacité du vaccin Covid-19 Janssen contre les formes symptomatiques de Covid-19, en particulier contre les formes sévères/critiques et les hospitalisations, l’efficacité restant toutefois à confirmer sur la mortalité ainsi que sur l’infection et la transmission virale.
La HAS estime que le vaccin Covid-19 Janssen peut être utilisé à partir de l'âge de 18 ans dans le cadre de son AMM conditionnelle et de la stratégie vaccinale française vis-à-vis de la Covid-19 définie par la HAS, y compris chez les personnes âgées de 65 ans et plus et/ou présentant des comorbidités, du fait de son efficacité vaccinale et de son profil de tolérance satisfaisant.
Compte tenu du schéma de vaccination à une dose, d’un conditionnement en flacons multidoses prêts à l’emploi et de la possibilité de conserver les flacons multidoses jusqu’à 3 mois dans des conditions réfrigérées classiques (2 à 8°C), ce vaccin présente plusieurs avantages en période pandémique et devrait permettre de simplifier les conditions d’acheminement, de stockage et d’administration et d’augmenter les capacités journalières de vaccination. De plus, les personnes vaccinées bénéficient d’une protection à partir de 14 jours après la vaccination et n’ont pas besoin de revenir pour l’injection d’une 2nde dose. Ce vaccin pourrait ainsi être utilisé de manière préférentielle dans les zones géographiques où l’épidémie est particulièrement active et où une accélération de la campagne de vaccination est estimée nécessaire. En outre, compte tenu des données disponibles à ce jour, montrant son efficacité persistante sur les variants sud-africains et brésiliens, ce vaccin présente un intérêt particulier dans les zones géographiques où ces souches circulent activement.
La HAS considère, par ailleurs, que le schéma de vaccination à une dose et les conditions de conservation de ce vaccin le rendent particulièrement adapté pour les publics les plus éloignés du système de santé, les personnes en situation de précarité économique et sociale, et les personnes en situation de handicap ou éprouvant des difficultés pour se déplacer.
Bien que les résultats suggèrent une efficacité contre les infections asymptomatiques par le SARS-CoV-2 à partir de 29 jours après la vaccination, ils doivent être interprétés avec précaution car le suivi est encore limité. Ces Si ces premiers résultats sont confirmés, le vaccin pourrait permettre de réduire la transmission du virus par les porteurs asymptomatiques, sans toutefois l’éliminer complètement. Ainsi, la HAS insiste sur la nécessité de maintenir l’ensemble des gestes barrières et des mesures de distanciation sociale, y compris après la vaccination.
Conformément à ses recommandations intermédiaires sur les modalités de mise en œuvre de la vaccination, la HAS recommande de simplifier le plus possible l’accès à la vaccination. Sur le plan logistique, compte tenu des conditions de conservation du vaccin Covid-19 Janssen, et même si le conditionnement multidoses de ce vaccin reste un frein potentiel, la HAS recommande de rendre accessible ce vaccin en ambulatoire, à proximité des lieux de vie ou de soins habituels de la population ciblée, et de favoriser la mise en œuvre d’un temps unique entre la prescription et l'acte vaccinal afin d’augmenter les capacités journalières de vaccination. À cette fin, la HAS recommande, comme pour les autres vaccins contre la Covid-19, un élargissement des compétences des professionnels de santé en matière de prescription et d’administration des vaccins contre la Covid-19. Conformément à son avis du 1er mars 2021, la HAS recommande donc que la prescription du vaccin Covid-19 Janssen soit possible pour les pharmaciens (sauf chez les femmes enceintes, et les personnes présentant un trouble de l’hémostase, les personnes sous traitement anti-coagulant n’étant pas concernés par cette limitation) et les sages-femmes (chez la femme, en particulier la femme enceinte, et dans l’entourage de celle-ci et de son enfant) et que l’administration puisse être réalisée par les infirmiers, les sages-femmes, et par les pharmaciens (formés et ayant déclaré cette activité), chez les personnes éligibles à une telle vaccination. Au vu de l’accélération de la campagne vaccinale et du recul acquis au cours des premières phases de la vaccination, la HAS évaluera l’opportunité d’élargir à nouveau le champ des compétences vaccinales des professionnels à impliquer.
La HAS estime par ailleurs que :
- Les études conduites chez l’animal avec le vaccin Covid-19 Janssen n'ont pas montré d'effets toxiques sur la reproduction et les données disponibles pour d'autres vaccins de Janssen utilisant l’Ad26 comme vecteur n’ont pas mis en évidence de risque accru pour la mère ou l'enfant lorsqu’ils sont administrés dans les 3 mois précédant la grossesse ou pendant la grossesse. Malgré l'expérience de l'utilisation du vaccin Covid-19 Janssen au cours de la grossesse encore limitée, l’administration du vaccin Covid-19 Janssen chez la femme enceinte n’est pas contre-indiquée ; elle doit être envisagée si les bénéfices l’emportent sur les risques potentiels pour la mère et le fœtus, au même titre que les vaccins à ARNm.
- Aucun effet sur l'enfant allaité n'est attendu compte tenu des résultats des études sur les effets du vaccin sur les animaux et les humains des études avec des vaccins à base d'Ad26 montrant une diffusion limitée de ce vecteur non réplicatif après une injection intramusculaire. Dans le cas où une petite quantité du vaccin Covid-19 Janssen serait (transitoirement) excrétée par le lait, elle ne serait pas considérée comme un risque pour l'enfant allaité. La vaccination chez la femme allaitante est possible.
- Aucune donnée ne permet d’estimer l’efficacité de ce vaccin sur certaines populations vulnérables, susceptibles de développer des formes graves de la Covid-19, telles que les personnes immunodéprimées, qui pourraient présenter une diminution de la réponse au vaccin et qui n’ont pas été incluses dans les essais. Il n’y a cependant pas d’arguments pour penser que le rapport bénéfice-risque puisse être défavorable chez ces personnes.
- Les personnes immunocompétentes ayant fait une infection datée par le SARS-CoV-2 (symptomatique ou non) prouvée par une PCR ou test antigénique doivent être considérées comme protégées pendant au moins 3 mois mais plus probablement 6 mois, contre l’infection par le SARS-CoV-2 par l’immunité post-infectieuse. Il est donc recommandé de réaliser leur vaccination au-delà de ce délai de 3 mois après l’infection, de préférence avec un délai proche de 6 mois. En cas de symptômes prolongés après Covid-19, une consultation médicale adaptée est nécessaire avant la vaccination pour juger au cas par cas de l’intérêt de celle-ci. La réalisation d’une sérologie pré-vaccinale n’est pas pertinente et donc non recommandée. Cependant, en cas de sérologie positive réalisée antérieurement, sans que l’infection ne soit datée, la période de 3 mois à 6 mois débute à la date de la sérologie.
La HAS souligne que les résultats de l’essai de phase 3 mené dans plusieurs pays dont la France selon un schéma vaccinal de 2 doses injectées à 56 jours d’intervalle sont attendus. Ils permettront de disposer de données supplémentaires d’immunogénicité, d’efficacité et de tolérance, en particulier concernant la protection à plus long terme et l’intérêt d’une dose de rappel. La HAS souhaite être informée des résultats des analyses plus fines en sous-groupes dans cet essai de phase 3, ainsi que des études mises en place dans le cadre du plan de gestion des risques (PGR).
La HAS encourage la mise en place d’études observationnelles, notamment en France, afin de suivre l’impact de la vaccination sur l’évolution de l’épidémie et d’études de séquençage des souches virales afin de suivre l’évolution de nouvelles souches et de d’évaluer leur impact sur l’efficacité vaccinale. Enfin, à ce jour, aucune donnée comparative n’existe entre les autres vaccins contre la Covid-19 et le vaccin Covid-19 Janssen.
Cet avis sera revu en fonction de l’évolution des connaissances, notamment au regard des résultats complets des essais de phase 3 de chaque candidat vaccin et des données observationnelles.