Stratégie vaccinale contre la Covid-19 : impact potentiel de la circulation des variants du SARS-CoV-2 sur la stratégie
L’arrivée sur le territoire national de nouveaux variants du virus SARS-Cov 2 fait l’objet d’une attention particulière dans la mesure où ceux-ci peuvent poser des problèmes spécifiques, qu’ils soient plus contagieux ou plus létaux. Ainsi, la question du maintien de la réponse immunitaire induite par les différents vaccins est soulevée.
Pour le variant dit « britannique » devenu majoritaire sur le territoire national, la réponse immunitaire est maintenue, en revanche pour d’autres variants, dont la présence est particulièrement surveillée, la question de la protection offerte par les vaccins paraît plus incertaine. Il s’agit en particulier des variants détectés en Afrique du Sud et au Brésil. Ces variants sont toutefois très minoritaires sur le territoire et ne présentent pas actuellement de dynamique spécifique au niveau national[1]. Dans un nombre limité de territoires, toutefois, leur présence est significative ; il s’agit de trois départements d’Outre-Mer (Guyane, la Réunion, Mayotte) et de la Moselle. En Moselle, à la Réunion et à Mayotte, le variant issu d’Afrique du Sud est significativement présent (prévalence de l’ordre de 35 % à fin mars en Moselle, de 20 % à Mayotte) et parfois quasiment majoritaire (prévalence de 57,5 % à La Réunion) depuis plusieurs semaines ; en Guyane, c’est le variant brésilien qui est significativement présent (prévalence de 61,4%). Dans tous les autres départements, la proportion de variant sud-africain parmi les PCR de criblage effectuées, est inférieure à 20 %.
Après les annonces du Gouvernement sud-africain concernant l’efficacité réduite du vaccin Astra Zeneca contre les souches locales du virus, et dans l’attente d’un éclairage scientifique plus complet sur le sujet, le Gouvernement Français a adapté, de façon préventive sa stratégie.
Pour ce qui concerne les DOM, un choix logistique imposant de fournir ces territoires dans un seul type de vaccin dans un premier temps, ce sont des vaccins à ARNm qui ont été envoyés.
En Moselle, une augmentation spécifique de près de 60 % des doses de vaccins à ARNm a été décidé pour le mois de mars.
Dans ce contexte, et dans l’attente de la mise à disposition de vaccins dont les performances vis-à-vis des nouveaux variants seront améliorées, une réflexion doit être menée autour de la stratégie vaccinale fondée sur les vaccins actuellement disponibles et ceux qui le seront à court terme dans les territoires précités.
L’analyse des réponses internationales face aux variants comporte peu d’exemples de mise en place d’une stratégie vaccinale différenciée nationale[2] ou locale[3]. Dans tous les cas, le choix, pragmatique, a été fondé sur le caractère prédominant du variant sud-africain.
Tant du point de vue de la prévalence du variant sud-africain que du contexte d’approvisionnement en vaccins, la situation apparaît différente entre les DOM (en particulier Mayotte et la Réunion) ; la Moselle et le reste du territoire national. Concernant les territoires où le variant sud-africain ou brésilien représente près de la moitié des cas et où la fourniture d’un seul type de vaccins est favorisée par les contraintes logistiques, (Guyane, Mayotte, La Réunion), la HAS recommande la poursuite de la stratégie mise en place avec utilisation exclusive des vaccins à ARNm.
Concernant la situation en Moselle, dans un contexte où le variant Sud-Africain est significativement présent mais sans augmentation de sa prévalence au cours des quatre dernières semaines, la HAS recommande à ce stade, de continuer à privilégier l’accès aux vaccins pour lesquels on dispose de données en faveur du maintien d’un niveau élevé d’efficacité contre le variant dit « sud-africain ». Il s’agit des vaccins Comirnaty® (BioNTech/Pfizer) et ARNm-1273® (Moderna)[4], d’une part et du vaccin Janssen[5], d’autre part, dès lors qu’il sera disponible.
Pour cela, la HAS recommande la mise en place, en Moselle, d’un accès à ces vaccins aux professionnels autorisés à la vaccination en ville.
Dans ce contexte épidémiologique très spécifique dans ces territoires, la HAS recommande de respecter un délai de 3 à 4 semaines entre les deux doses pour les vaccins à ARMm.
Le variant dit « sud -africain » diffuse à un niveau nettement inférieur, estimé à moins de 20% actuellement dans tous les autres départements, ce qui ne justifie pas de mettre en place, à ce stade, de stratégie différenciée de recours aux vaccins dans d’autres territoires.
La HAS recommande que ces stratégies soient déployées ou poursuivies au cours des prochaines semaines et que la situation soit réévaluée rapidement. Elle poursuivra sa veille sur l’efficacité des différents vaccins face aux variants, sur les stratégies déployées au niveau international ainsi que ses travaux sur la pertinence d’une stratégie différenciée selon la prévalence des différents variants.La HAS rappelle qu’il reste impératif d’accélérer l’obtention d’une couverture vaccinale optimale de la population et qu’il n’y a pas lieu, au regard des données actuelles, de modifier la stratégie vaccinale au niveau national, qui vise à réduire les formes graves de la maladie et à vacciner en priorité les personnes les plus fragiles avec toutes les doses de vaccin disponibles.
La surveillance de la circulation des souches apparaît évidemment indispensable et doit être poursuivie.
[1] Passage de 45% début mars à 35 % de proportion de variant SA fin mars en Moselle
[2] L’Afrique du Sud a renoncé au vaccin Astra Zeneca au vu de son efficacité limitée sur le variant local.
[3] Le Québec a écarté le vaccin Astra Zeneca sur un seul territoire où ce variant est prédominant.
[4] pour lesquels, malgré l’absence de données d’efficacité clinique, les données d’immunogénicité sont en faveur du maintien d’un niveau élevé d’efficacité vis-à-vis de ce variant.
[5] Sur le variant B.1.351, dit « sud-africain », l’efficacité du vaccin Janssen est de l’ordre de 50 % sur les formes symptomatiques et de 73 % contre les formes sévères.