COPIKTRA (duvélisib) - Leucémie lymphoïde chronique
Nature de la demande
Première évaluation
Avis défavorable au remboursement dans le traitement des patients adultes atteints de leucémie lymphoïde chronique récidivante ou réfractaire après au moins deux traitements antérieurs et de lymphome folliculaire réfractaire à au moins deux traitements systémiques antérieurs.
Quelle place dans la stratégie thérapeutique ?
1- Leucémie lymphoïde chronique (LLC) en rechute ou réfractaire
Selon les recommandations, les indications thérapeutiques sont définies en fonction de la présence de symptômes et de l’évolutivité de la maladie (selon les classifications existantes de Binet et Rai).
En pratique de routine, les patients ayant une maladie asymptomatique à un stade précoce (Rai 0, Binet A) doivent être surveillés sans traitement sauf s’ils ont des signes de progression de la maladie ou des symptômes liés à la maladie.
Chez les malades nécessitant un traitement, le choix de la 1ère ligne de traitement dépend de plusieurs paramètres : l’âge, l’état général du patient, la présence ou non de comorbidités et le statut cytogénétique (présence de la délétion (del)17p et/ou de la mutation de TP53, statut mutationnel IGVH) :
- En présence d’une mutation TP53 et/ou d’une délétion (del)17p :
* IMBRUVICA (ibrutinib) en monothérapie, actuellement le traitement de référence,
* CALQENCE (acalabrutinib) en monothérapie ou en association à l’obinutuzumab
- En l’absence de mutation TP53 ou de délétion (del)17p :
* Chez les patients sans comorbidités significatives, la Commission de Transparence a estimé que la stratégie thérapeutique devait être adaptée selon le statut mutationnel IGVH du patient :
- Chez les patients ayant un statut IGVH muté, le choix est discutable entre l’immunochimiothérapie par rituximab + fludarabine + cyclophosphamide (protocole FCR) et la thérapie ciblée avec l’association IMBRUVICA (ibrutinib) + rituximab.
- En cas de statut IGVH non-muté (actuellement reconnu comme facteur de mauvaise réponse à l’immunochimiothérapie), l’association IMBRUVICA (ibrutinib) + rituximab est le traitement de première intention.
- A noter qu’en France, IMBRUVICA (ibrutinib) en monothérapie ne dispose actuellement pas d’indication remboursée pour le traitement de 1ère ligne des patients éligibles au protocole FCR et ne présentant pas de mutation TP53 ou de délétion (del)17p.
* Chez les patients âgés et/ou ayant des comorbidités les rendant inéligibles au protocole standard FCR à « pleine dose » les options sont :
- Les associations anticorps monoclonal anti-CD20 et chimiothérapie : GAZYVARO (obinutuzumab) + chlorambucil (protocole G-Clb), MABTHERA (rituximab) + bendamustine (BR)
- Les thérapies ciblées : VENCLYXTO (vénétoclax) + GAZYVARO (obinutuzumab) (G-VEN)
- IMBRUVICA (ibrutinib) en monothérapie.
- L’acalabrutinib (CALQUENCE) en association au à l’obinutuzumab.
Chez les patients en rechute ou réfractaires, l’instauration d’une 2ème ligne de traitement se fonde sur les mêmes critères que ceux utilisés en 1ère ligne. Le choix du traitement dépend de plusieurs paramètres, tels que les comorbidités, l’existence d’une mutation 17p et/ou mutation TP53 (à rechercher de nouveau), la nature du ou des traitements précédents et la durée de la dernière réponse. D’après les recommandations les traitements de 2ème ligne et plus reposent préférentiellement sur ces options thérapeutiques :
- ibrutinib (IMBRUVICA) ;
- idelalisib (ZYDELIG) en association au rituximab ;
- vénétoclax seul ou en association au rituximab, uniquement en tant que traitement de recours dans la LLC avec délétion 17p ou mutation TP53 chez des patients en échec à un inhibiteur du récepteur antigénique des cellules B (2ème ligne et plus), et sans délétion 17p ou mutation TP53 chez des patients en échec à la fois à une chimio-immunothérapie et à un inhibiteur du récepteur antigénique des cellules B (3ème ligne et plus) ;
- acalabrutinib (CALQUENCE) en monothérapie, uniquement chez les patients ne présentant pas de délétion 17p ni de mutation TP53.
A noter que l’immunochimiothérapie (en l’absence de délétion 17p/mutation TP53) ainsi que l’alemtuzumab, sont des options thérapeutiques en 2ème ligne ou plus. La place de l’alemtuzumab (disponible en ATU nominative) est cependant aujourd’hui marginale.
Place du médicament dans la stratégie thérapeutique :
Compte tenu :
- -de la démonstration d’une supériorité du duvélisib en monothérapie par rapport à un comparateur considéré comme non pertinent à la date du présent avis, l’ofatumumab, dans l’étude de phase III DUO, avec de plus :
*un gain modeste en termes de survie sans progression (critère de jugement principal ; 13,3 mois vs 9,9 mois ; HR = 0,52 ; IC95% [0,39 ; 0,69]) et de taux de réponse globale (critère de jugement secondaire hiérarchisé ; 73,8 % vs 45,3 % ; OR = 3,50, 1 seule réponse complète)
* l’absence de supériorité démontrée en termes de survie globale, critère considéré comme le plus cliniquement pertinent à ce stade de la maladie,
*et en l’absence de conclusion possible sur les résultats de qualité de vie (critère exploratoire) ;
- De la transposabilité des résultats à la pratique non assurée compte tenu :
* de l‘exclusion des patients préalablement traités par inhibiteur de tyrosine kinase ou inhibiteur bcl-2, considérés comme les standards de traitement à ce stade de la maladie,
* de l’inclusion de patients en 2ème ligne de traitement alors que l’AMM n’a été validée qu’à partir de la 3ème ligne (60 % des patients de l’étude, analyses en sous-groupe post-hoc exploratoires) ;
- Des données de tolérance préoccupantes, marquées principalement par des diarrhées/colites, des neutropénies et des événements infectieux, avec des proportions importantes d’événements indésirables considérés comme graves (72,8 % vs 32,3 %), ayant entrainé l’arrêt du traitement (36,0 % vs 5,8 %) et parfois le décès (12,0 % vs 4,5 %), par rapport au groupe ofatumumab ;
La Commission considère que COPIKTRA (duvélisib) n’a pas de place dans la stratégie thérapeutique des patients adultes atteints de LLC en rechute ou réfractaire à au moins deux traitements systémiques antérieurs
2- Lymphome folliculaire (LF) réfractaire
En 1ère ligne de traitement, et d’après les recommandations nationales et internationales, les options thérapeutiques reposent sur une immuno-chimiothérapie, c’est-à-dire une association rituximab + chimiothérapie (de type R-CHOP, R-CVP ou R-bendamustine majoritairement) suivi par un traitement d’entretien à base de rituximab. Dans certains cas, un traitement par rituximab en monothérapie peut être recommandé (hors AMM). En alternative au rituximab, l’obinutuzumab (GAZYVARO) peut également être utilisé en induction en association à une chimiothérapie (de type CHOP, CVP ou bendamustine majoritairement), suivi par un traitement d’entretien à base d’obinutuzumab.
En cas de non-réponse ou de progression, un protocole de 2ème ligne est proposé. Une nouvelle biopsie d’un échantillon tumoral éventuellement guidée par PET-scan est recommandée afin d’éliminer une transformation en lymphome B diffus à grande cellule. Le traitement de 2ème ligne dépend du traitement de 1ère ligne reçu, du type et de la durée de la rémission de la ligne précédente et de la dissémination de la maladie. Les traitements de deuxième ligne reposent sur :
- -une nouvelle immuno-chimiothérapie (R-CHOP, R-CVP, R-bendamustine, O-bendamustine),
- ou une radio-immunothérapie si le degré d’envahissement médullaire le permet,
- et/ou une autogreffe de cellules souches si l’âge le permet et particulièrement en cas de rechute précoce
Chez les patients non réfractaires au rituximab, dans les situations où une chimiothérapie de type CHOP, bendamustine ou CVP n’est pas réalisable, le lénalidomide (REVLIMID) peut être utilisé en association au rituximab.
A partir de la 3ème ligne, un traitement par idelalisib (ZYDELIG) peut être proposé ainsi que les traitements utilisés en 2ème ligne.
Place du médicament dans la stratégie thérapeutique :
Compte tenu :
- des résultats de l’étude de phase II non comparative DYNAMO menée chez des patients atteints de lymphome non hodgkinien, dont 60 % atteints de lymphome folliculaire correspondant à l’AMM, avec un gain modeste en termes de taux de réponse globale (42,2 % dont 1 seule réponse complète), critère de jugement principal considéré comme non pertinent à ce stade de la maladie ;
- de l’absence de comparaison aux traitements actuellement disponibles alors que celle-ci était réalisable ;
- des données de tolérance préoccupantes, en ligne avec les données retrouvées dans l’indication LLC et avec les autres inhibiteurs de PI3K ;
la Commission considère que COPIKTRA (duvélisib) n’a pas de place dans la stratégie thérapeutique des patients atteints de LF réfractaire à au moins deux traitements systémiques antérieurs.
Service Médical Rendu (SMR)
Insuffisant |
Le service médical rendu par COPIKTRA (duvélisib) est insuffisant, au regard des alternatives disponibles, pour justifier d’une prise en charge par la solidarité nationale dans les indications de l’AMM. |
Amélioration du service médical rendu (ASMR)
Sans objet |