Avis n°2022.0054/AC/SESPEV du 6 octobre 2022 du collège de la Haute Autorité de santé relatif à la stratégie de vaccination contre le Monkeypox
Cet avis répond aux questions relatives au délai à respecter pour l’administration de la seconde dose de vaccin contre le Monkeypox, la possibilité d’administration par voie intradermique en cas de tensions d’approvisionnement, l’extension de la population cible de la vaccination préexposition aux femmes vivant avec un HSH multipartenaire.
Il reprend les positions de la HAS mentionnées dans les réponses rapides du 1er septembre relatives à la vaccination après une infection à Monkeypox, sur le consentement des parents pour une vaccination préventive des mineurs et sur la co-administration possible avec un vaccin contre la Covid-19.
Quels sont les objectifs de cet avis ?
Préciser la stratégie vaccinale contre le Monkeypox compte tenu de l’évolution de l’épidémie et des approvisionnements limités en doses de vaccins.
Principales conclusions de la recommandation
La HAS confirme la nécessité d’administrer la deuxième dose dans les meilleurs délais à partir de 28 jours, en fonction des possibilité logistiques, afin de garantir une protection optimale contre l’infection à Monkeypox. En cas de tension d’approvisionnement, la HAS rappelle sa recommandation de prioriser l’injection de la première dose au plus grand nombre et de différer l’administration de la seconde dose si la situation le nécessite.
Conformément à l’avis de l’ANSM, dans le cas d’approvisionnement limité en vaccins, la HAS estime que la voie intradermique (ID) à la dose de 0,1 ml (contre 0,5 ml pour la voie sous-cutanée) peut être envisagée comme une alternative possible chez les adultes. La HAS recommande d’utiliser la voie ID préférentiellement en deuxième dose chez les personnes ayant reçu une première dose par voie sous-cutanée (SC) et n’ayant pas ou peu présenté de réaction au site d’injection. Elle précise que les deux voies d’administration sont interchangeables pour finir le schéma de vaccination. Pour les personnes immunodéprimées, les femmes enceintes, les enfants et les personnes avec antécédents de cicatrice chéloïde, la HAS précise que seule la voie SC est recommandée. En outre, en cohérence avec l’avis de l’ANSM, la HAS rappelle que l’administration par voie ID nécessite la mise à disposition de matériel d’injection spécifique (seringues à tuberculine avec aiguilles de 27 ou 26 gauges (code couleur gris ou marron en Europe), de 6,35 mm à 12,7 mm à biseau court) et devra être effectuée par des professionnels de santé expérimentés dans la technique d’injection intradermique ou ayant bénéficié d’une formation, afin de réduire le risque de mésusage au moment de l’injection. La HAS encourage l’acquisition de données supplémentaires d’efficacité et de sécurité lors d’études en vie réelle dans le cadre de l’utilisation de la voie ID.
La HAS recommande que la vaccination en préexposition par les vaccins de 3ème génération MVA-BN (Imvanex et Jynneos) puisse être proposée aux femmes partenaires occasionnelles ou partageant le même lieu de vie que des personnes à très haut risque d’exposition incluant les HSH rapportant des partenaires sexuels multiples et les personnes trans rapportant des partenaires sexuels multiples, les personnes en situation de prostitution et les professionnels des lieux de consommation sexuelle, quel que soit le statut de ces lieux.
Par ailleurs, la HAS confirme ses recommandations formulées dans les réponses rapides sur l’infection par le virus Monkeypox du 5 septembre 2022 :
- La HAS rappelle que, compte tenu de l’immunité naturelle conférée par l’infection, il n’y a pas d’indication à vacciner les personnes infectées ni à faire une deuxième dose de vaccin (troisième dose pour les sujets immunodéprimés) chez les personnes ayant contracté l’infection après une première dose (ou deuxième dose chez les sujets immunodéprimés) ;
- Concernant la vaccination des mineurs, la HAS précise qu’elle doit être envisagée au cas par cas (situations particulières) aux mineurs entrant dans les cibles vaccinales (notamment ceux pris en charge dans les CEGIDD), par les seuls spécialistes, après une évaluation stricte des bénéfices et des risques pour le mineur concerné, dans le cadre d’une décision médicale partagée, et dans les conditions fixées aux articles L.1111-2 et suivants du code de la santé publique, concernant l’information et le consentement des mineurs et des titulaires de l'autorité parentale ;
- Le vaccin de 3ème génération (Imvanex/ Jynneos) est un vaccin vivant atténué non replicatif. Il peut de ce fait être utilisé chez les personnes immunodéprimés. Il peut être coadministré avec tout autre vaccin du calendrier vaccinal, y compris les vaccins Covid-19. Si l’administration n’a pas été simultanée, aucun délai n’est à respecter entre ce vaccin et tout autre vaccin du calendrier vaccinal, à l’exception des autres vaccins vivants atténués viraux (ROR, varicelle, zona, fièvre jaune) pour lesquels un intervalle d’au moins 4 semaines doit être ménagé.
La HAS souligne l’importance de disposer prochainement de :
- Données en vie réelle complémentaires relatives à l’efficacité et à la tolérance du vaccin antivariolique de 3ème génération, administré en pré exposition et en post exposition au virus de Monkeypox, sur la prévention des formes graves et sur la transmission de la maladie dans les différents sous-groupes de population ;
- Données d’efficacité et de sécurité en vie réelle dans le cadre de l’utilisation de la voie ID.
Ainsi, afin d’améliorer les connaissances autour de la vaccination, la HAS encourage vivement les personnes qui le souhaitent à participer aux études en cours sur le Monkeypox. Plusieurs cohortes ont été mises en place :
- Une cohorte existante de l’ANRS - Maladies infectieuses émergentes pour l’Europe (ANRS-MIE) chez les personnes sous PrEP qui intégrera les données de la vaccination contre le Monkeypox ;
- Une cohorte internationale de personnes infectées par le Monkeypox (ANRS MOSAIC), en collaboration avec l’Université d’Oxford, les Hôpitaux Universitaires de Genève, et coordonnée par l’ANRS-MIE. Ce projet vise à mieux comprendre la maladie et évaluer l’impact de la prise en charge des patients infectés. Les premiers patients ont été inclus en France le 13 juillet 2022 ;
- Une nouvelle cohorte de personnes contacts à risque d’infection Monkeypox (MONKEY VAX) mise en place par l’ANRS-MIE et l’AP-HP qui permettra d’étudier l’efficacité de la vaccination post-exposition des vaccins de troisième génération et dont les premiers patients ont été inclus en France le 13 juillet 2022.
La HAS poursuit ses travaux de veille scientifique et adaptera ses avis en conséquence.
La HAS rappelle par ailleurs la nécessité de respecter les mesures de prévention de la transmission du virus Monkeypox en milieu hospitalier et au domicile, telles que préconisées par le HCSP dans son avis du 8 juillet 2022 et la conduite à tenir telle que préconisée par Santé Publique France (www.sexosafe.fr) pour se protéger contre la variole du singe, y compris pour les personnes vaccinées.