Dépistage néonatal : critères d’évaluation pour l’intégration de nouvelles maladies au programme national du dépistage à la naissance
Le dépistage néonatal (DNN) est une intervention de santé publique visant à détecter dès la naissance certaines maladies rares mais graves. L’objectif est de mettre en œuvre, avant l’apparition de symptômes, des mesures appropriées afin d’éviter ou de limiter les conséquences négatives de ces maladies sur la santé des enfants. En France, ce dépistage fait l’objet d’un programme national.
L’importance d’asseoir des critères d’évaluation pour définir les maladies à intégrer au programme de DNN a été portée par la DGS en 2018 lors d’une saisine ministérielle. La HAS a traité ce sujet en même temps que l’évaluation conduite en 2019 visant à établir, parmi 24 erreurs innées du métabolisme (EIM), celles qui pouvaient être incluses au programme de DNN. Lors de l’examen de cette évaluation en Commission d’évaluation économique et de santé publique (CEESP), les membres ont jugé nécessaire de communiquer spécifiquement sur la méthode d’analyse originale élaborée, à des fins de transparence et dans le but de guider les évaluations ultérieures menées dans le cadre de ce programme.
Ce guide est donc destiné principalement à être utilisé par les chefs de projets scientifiques de la HAS, dans le respect des normes déontologiques et des procédures de l’institution pour mener à bien les missions qui lui ont été confiées.
La méthode de travail s’est d’abord fondée sur la réalisation d’un état des lieux des critères utilisés à l’international, notamment dans les pays européens. La comparaison des critères utilisés selon les pays et de leur méthodologie d’évaluation des maladies à dépister a montré une absence de consensus international, le nombre et la nature des maladies dépistées variant notablement d’un pays à l’autre. Toutefois, l’ensemble des pays se fondent sur les critères historiques de Wilson et Jungner, publiés en 1968, qui ont évolué dans chaque pays pour s’enrichir, se préciser et s’adapter au contexte de santé publique.
En particulier, une comparaison exhaustive des critères des autres pays avec ceux utilisés par la HAS (définis par l’ANAES en 2004 pour le dépistage en général), montre que ces critères, bien que robustes et détaillés, doivent être adaptés au contexte spécifique du DNN.
La deuxième partie présente la méthodologie élaborée en 2019 et utilisée dans l’évaluation de deux recommandations récentes[1],[2].
Il s’agit d’une méthode d’analyse décisionnelle multicritère, fondée sur une démarche d’évaluation à la fois systématique (mobilisant les critères habituels d’évaluation d’un dépistage) et originale (étant donné le nombre important de maladies évaluées et les modalités de consultation des experts). Elle retient essentiellement six critères d’importance égale, considérés comme majeurs dans le DNN :
- La bonne connaissance de la maladie ;
- Un temps d’apparition des symptômes supérieur à 7 jours ;
- La gravité de la maladie ;
- La démonstration d’un traitement efficace ;
- La démonstration d’un bénéfice individuel de l’intervention précoce ;
- La fiabilité de l’examen de dépistage.
D’autres critères, tels que l’incidence d’une maladie rare, l’impact organisationnel et l’impact économique, sont considérés comme mineurs et sont analysés dans un but informatif. En plus des critères à prendre en compte, le guide présente un outil d’aide à la décision, s’appliquant aussi bien pour l’évaluation d’une seule maladie que pour un panel.
Cet outil n’a pas vocation à arbitrer à lui seul l’intérêt de dépister une ou plusieurs maladies mais à servir de fil conducteur pour structurer la réflexion d’un groupe de travail pluridisciplinaire, autour de connaissances solides sur la ou les maladie(s) et des critères majeurs à prendre en considération. Il vise à objectiver le choix des experts et d’accompagner les délibérations en séances.
La nature de ce document en fait un élément évolutif, qui devra tenir compte à la fois des connaissances scientifiques à venir sur les maladies candidates au DNN et les examens biologiques concernés, mais également de l’évolution des aspects de types organisationnels, légaux et économiques.
[1] Haute Autorité de santé. Évaluation a priori de l’extension du dépistage néonatal à une ou plusieurs erreurs innées du métabolisme par la technique de spectrométrie de masse en tandem en population générale en France (volet 2). Saint-Denis La Plaine: HAS; 2020.
[2] Haute Autorité de santé. Évaluation a priori de l’extension du dépistage néonatal au déficit immunitaire combiné sévère par la technique de quantification des TRECs en population générale en France. Saint-Denis La Plaine: HAS; 2022.