Nature de la demande

Extension d'indication

Extension d'indication.

L'essentiel

Avis favorable au remboursement d’HEMLIBRA (emicizumab) dans l’extension d’indication « prophylaxie pour prévenir les épisodes hémorragiques chez les patients atteints d’hémophilie A (déficit congénital en facteur VIII), sans inhibiteur anti-facteur VIII qui ont une forme modérée (FVIII ≥ 1% et ≤ 5%) avec un phénotype hémorragique sévère. HEMLIBRA peut être utilisé dans toutes les tranches d’âge. »

Quel progrès ?

Pas de progrès dans la prise en charge.

Quelle place dans la stratégie thérapeutique ?

Chez les patients atteints d’hémophilie A congénitale modérée sans inhibiteur anti-facteur VIII présentant un phénotype hémorragique sévère ayant l’indication d’une prophylaxie au long cours, HEMLIBRA (emicizumab) est un traitement de 1ère intention au même titre que les concentrés de FVIII.

Les données cliniques actuellement disponibles dans l’hémophilie modérée, limitées, descriptives, et issues d’une étude ayant inclus une population très hétérogène, ne permettent pas de conclure à l’efficacité d’une prophylaxie au long cours par HEMLIBRA (emicizumab) en comparaison à celle par facteur VIII bien conduite.

Le principal intérêt d’HEMLIBRA (emicizumab) est l’allègement des contraintes thérapeutiques en comparaison à une prophylaxie par FVIII (injection sous-cutanée hebdomadaire, toutes les 2 ou toutes les 4 semaines, versus perfusions IV généralement pluri-hebdomadaires). Néanmoins, la Commission souligne que cet allègement ne doit pas conduire à élargir les indications actuelles d’une prophylaxie au long cours dans l’hémophilie modérée et qu’HEMLIBRA (emicizumab) doit être prescrit dans le respect de son AMM (« patients atteints d’hémophilie A sans inhibiteur anti-facteur VIII qui ont une forme modérée avec un phénotype hémorragique sévère »). Du fait du peu de données cliniques disponibles dans cette population, l’impact de son mécanisme d’action (compétitivité avec le FVIII) sur son efficacité et le risque thrombotique en présence de niveaux d'activité du FVIII endogène ≥ 1 % reste encore source d’incertitudes1.

Pour rappel, et conformément au PNDS2, la prophylaxie chez un hémophile modéré ou mineur n’est pas le traitement de première intention. En effet, dans les formes modérées et mineures d’hémophilie, sauf exception, les saignements sont rarement spontanés et sont essentiellement provoqués (en cas de chirurgie, geste invasif ou traumatisme). Cependant, les patients ayant une forme modérée à taux proche du seuil d’hémophilie sévère peuvent présenter des hémarthroses plus ou moins spontanées et avoir un phénotype hémorragique d’hémophile sévère. Chez certains de ces patients, une prophylaxie, parfois pour une durée déterminée, pourra donc être proposée.

Quelques patients ayant l’indication d’une prophylaxie rigoureuse par facteur VIII pourraient être traités de manière sous-optimale ou ne pas bénéficier d’une telle prophylaxie du fait de la lourdeur thérapeutique ou des difficultés liées à l’abord veineux, avec potentiellement pour conséquences des accidents hémorragiques plus fréquents, un recours au service spécialisé, ou encore des complications articulaires.

La Commission rappelle que ce traitement doit être instauré sous la surveillance d’un médecin expérimenté dans le traitement de l’hémophilie et/ou des troubles de l’hémostase. Une « nouvelle » éducation thérapeutique des patients et de leur famille est par ailleurs nécessaire et essentielle. Il est important de s’assurer d’un suivi maintenu, d’une excellente compréhension du traitement et de ses modalités d’administration par voie sous-cutanée, de rappeler les symptômes ou situations qui peuvent justifier un traitement complémentaire par facteur VIII (cas de la chirurgie ou des gros traumatismes). Par ailleurs, une information appropriée des professionnels de santé prenant en charge les patients (pédiatres, généralistes, cardiologues…) est indispensable. Le suivi biologique des patients sous HEMLIBRA (emicizumab) relève de cliniciens très spécialisés.

La gestion des événements hémorragiques ou traumatiques intercurrents, ainsi que la gestion des interventions chirurgicales urgentes ou programmées sous HEMLIBRA (emicizumab) ne sont que très peu documentée et doivent encore être précisées. Il convient notamment de prendre en compte le fait que l’emicizumab augmente la capacité de coagulation, par conséquent, la dose de FVIIa ou de FVIII requise pour obtenir l'hémostase peut être inférieure à celle utilisée en l’absence de prophylaxie par HEMLIBRA (emicizumab).

La Commission souhaite attirer l’attention sur le risque d’immunisation contre l’emicizumab, comme avec toute protéine thérapeutique. Celle-ci peut conduire à une perte d'efficacité et à devoir changer de traitement. De même, l’administration de FVIII restant nécessaire en cas de saignement ou traumatisme sous HEMLIBRA (emicizumab), les patients peuvent développer des inhibiteurs anti- FVIII qui rendront ce traitement inefficace.


Service Médical Rendu (SMR)

Important

Le service médical rendu par HEMLIBRA 30 mg/ml et 150 mg/ml (emicizumab), solution injectable, est important dans l’indication de l’AMM « prophylaxie pour prévenir les épisodes hémorragiques chez les patients atteints d’hémophilie A (déficit congénital en facteur VIII), sans inhibiteur anti-facteur VIII qui ont une forme modérée (FVIII = 1% et = 5%) avec un phénotype hémorragique sévère ».


Amélioration du service médical rendu (ASMR)

V (absence)

Considérant :

  • l’efficacité d’HEMLIBRA (emicizumab) observée en prophylaxie au long cours chez des patients avec une hémophilie A modérée dans l’étude clinique HAVEN 6 dont l’objectif principal était l’évaluation de la tolérance, avec un taux annualisé de saignements traités (critère de jugement principal de l’efficacité) estimé à 0,9 (IC 95%, 0,50-1,78) avec 68,6% des patients qui n’ont eu aucun saignement traité,
  • la faible qualité de cette démonstration du fait des limites méthodologiques importantes de l’étude, notamment son caractère ouvert et non contrôlé source de biais pour l’estimation du taux de saignements traités, la nature purement descriptive des résultats en l’absence de toute hypothèse quant à l’effet attendu de l’emicizumab, et le faible effectif sur lequel repose l’évaluation (données issues d’un sous-groupe de 51 patients),
  • les incertitudes quant à la représentativité de la population incluse par rapport à celle validée par l’AMM « patients atteints d’hémophilie A sans inhibiteur anti-facteur VIII qui ont une forme modérée avec un phénotype hémorragique sévère », du fait de la forte hétérogénéité des patients inclus, en particulier en termes de profil hémorragique, et du fait que le taux de FVIII endogène à l’inclusion n’était pas connu pour tous les patients, ce qui a pu conduire à sous-estimer le nombre de patients avec hémophilie mineure inclus,
  • l’absence de données robustes permettant d’évaluer l’intérêt d’une prophylaxie par emicizumab en comparaison à une prophylaxie conventionnelle par facteur VIII,

et malgré :

  • le bénéfice attendu sur la qualité de vie du fait de l’allègement du poids thérapeutique de la prophylaxie en comparaison aux FVIIl,

la Commission considère qu’HEMLIBRA 30 mg/ml et 150 mg/ml (emicizumab), solution injectable, n’apporte pas d’amélioration du service médical rendu (ASMR V) dans la stratégie thérapeutique actuelle.


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