Obligations vaccinales des professionnels : la HAS publie le 2nd volet de ses travaux

Communiqué de presse - Mis en ligne le 31 juil. 2023
31 juillet 2023

La Haute Autorité de santé publie la seconde partie de ses travaux consacrés aux obligations et recommandations vaccinales des professionnels. Ce volet traite des vaccins actuellement recommandés pour les professionnels, soit les vaccins contre la coqueluche, la grippe, l’hépatite A, la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle. La HAS préconise de rendre obligatoire l’immunisation contre la rougeole et de maintenir les recommandations de vaccination contre la coqueluche, la grippe, l’hépatite A, et la varicelle. S’agissant de la grippe, elle insiste sur la nécessité de collecter des données robustes sur les infections grippales contractées au sein des établissements prenant en charge les personnes à risque de forme sévère ou compliquée de la maladie. La collecte de ces données constitue un préalable au réexamen de cette position. Plus largement, la HAS réaffirme l’intérêt de la vaccination contre ces maladies, en milieu professionnel comme en population générale.

Saisie par la Direction générale de la santé afin d’actualiser l’ensemble des obligations et recommandations vaccinales des professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social, la HAS a publié le 30 mars dernier le premier volet de ses travaux, consacré aux vaccins qui faisaient alors l’objet d’une obligation vaccinale (Covid-19, diphtérie, tétanos, poliomyélite et hépatite B). Elle complète aujourd’hui son actualisation, en publiant le second volet, relatif aux vaccins contre la coqueluche, la grippe, l’hépatite A, la rougeole, les oreillons, la rubéole et la varicelle. Ces travaux, qui concernent les professionnels de santé mais également les professionnels qui exercent en établissements de santé, au sein des structures sociales et médico-sociales, ont été élaborés sur la base d’arguments médicaux et scientifiques. Ils sont à distinguer de l’avis complémentaire du Comité consultatif national d’éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE), rendu le 11 juillet dernier, sur les questions éthiques soulevées par les obligations vaccinales des professionnels.

Pour rendre son avis, la HAS s’est appuyée sur les critères de mise en œuvre d’une obligation vaccinale pour les professionnels, proposés par le Haut Conseil de la Santé Publique en 2016. Selon ces quatre critères cumulatifs, la décision de mettre en œuvre ou de maintenir une obligation vaccinale pour les professionnels s’applique pour la prévention d’une maladie grave, qui présente un risque élevé d’exposition pour le professionnel, un risque de transmission à la personne prise en charge et pour laquelle il existe un vaccin sûr et efficace.  La HAS a donc notamment pris en compte les dernières données épidémiologiques des maladies concernées, les données relatives aux risques de transmission en milieu professionnel, les données de couverture et d’efficacité vaccinale ainsi que la disponibilité des vaccins.

Comme pour le premier volet, ces travaux ont été enrichis par les contributions des parties prenantes (associations d’usagers, sociétés savantes, ordres, organismes public, établissements de santé ou médico-sociaux, etc.), issues d’une consultation publique organisée entre le 21 juin et le 7 juillet.

Sur la base des données actuellement disponibles, la HAS recommande au ministère de mettre en œuvre pour les professionnels une obligation d’immunisation contre la rougeole, et de maintenir les recommandations de vaccination contre la coqueluche, la grippe, l’hépatite A et la varicelle.

 

La HAS recommande une obligation d’immunisation contre la rougeole pour les professionnels

Maladie infectieuse figurant parmi les plus contagieuses, la rougeole peut entrainer des complications sévères chez les personnes non immunisées, particulièrement les nourrissons de moins de 12 mois (âge de la première dose de vaccin conformément au calendrier vaccinal), les jeunes adultes, les femmes enceintes et les patients immunodéprimés. Ce risque est particulièrement présent en milieu de soins et touche le personnel soignant et les patients. Des études de Santé publique France indiquent que les professionnels de santé sont impliqués dans 75 à 83% des cas de rougeole en établissement de santé en France. Cette contagiosité, combinée à l’existence d’un vaccin proposant une protection efficace (supérieure à 95% après un schéma vaccinal complet) et durable (à vie, pour les personnes non immunodéprimées), conduisent la HAS à préconiser une obligation d’immunisation contre la rougeole. Concrètement, les étudiants et professionnels non vaccinés ou ne pouvant pas attester d’une contamination, devront ainsi faire l’objet d’une vaccination. En cas de doute, la HAS ouvre la possibilité qu’un test sérologique puisse être effectué en amont pour établir le statut immunitaire. Par ailleurs, ce vaccin étant contre-indiqué pour les femmes enceintes, toute femme en âge de procréer doit effectuer, en cas de doute, un test de grossesse avant une vaccination.  

De facto, en l’absence de disponibilité d’un vaccin rougeole non combiné et conformément au schéma vaccinal actuellement en vigueur, la HAS préconise que cette vaccination soit administrée avec deux doses de vaccin trivalent ROR (rougeole, oreillons, rubéole). Les personnes nées avant 1980 ne doivent quant à elles recevoir qu’une seule dose.

 

Une recommandation vaccinale maintenue à l’identique pour la grippe, la coqueluche l’hépatite A et la varicelle

Concernant la vaccination des professionnels contre la grippe saisonnière, la HAS regrette en premier lieu la faible couverture vaccinale des professionnels, de l’ordre de 22 à 25,9% en 2021-2022[1], bien loin de l’objectif fixé à 70%[2]. Cette faible couverture pose légitimement la question de l’obligation vaccinale. La HAS a pris connaissance des données internationales témoignant de l’impact considérable de l’instauration d’une obligation de vaccination antigrippale sur la couverture vaccinale des soignants (jusqu’à des taux supérieurs à 90%). Elle a également noté que plusieurs études suggèrent, mais avec un faible niveau de preuve, que l’augmentation de la couverture vaccinale des soignants contre la grippe pourrait réduire significativement le nombre d’infections et de décès chez les patients hospitalisés (fardeau nosocomial).

In fine, la HAS préconise que la recommandation de vaccination contre la grippe soit, à ce stade, maintenue à l’identique pour les raisons suivantes : l’efficacité inconstante selon les années de la vaccination antigrippale ; et l’insuffisance des données disponibles à ce jour sur le fardeau de la grippe nosocomiale chez les personnes prises en charge et sur l’impact de la vaccination des soignants sur ce fardeau (faible niveau de preuve des études et variabilité entre les études des seuils de couverture vaccinale permettant d’observer un impact).

C’est pourquoi elle insiste sur la nécessité de mettre en œuvre des études de grande ampleur notamment dans les établissements prenant en charge les personnes à risque de grippe sévère ou compliquée dans l’objectif de combler cette insuffisance de données.  Dans l’attente de ces nouvelles données ou de vaccins d’efficacité plus constante, la HAS préconise le maintien des recommandations en vigueur.

Pour l’hépatite A, la recommandation s’explique notamment par l’évolution généralement bénigne de l’infection, par la circulation limitée du virus et les risques très faibles de transmission nosocomiale, notamment lorsque sont respectées les précautions générales d’hygiène. C’est pourquoi, la HAS insiste sur l’importance du respect des règles d’hygiène, et particulièrement du lavage des mains dans la prévention de la transmission de la maladie. Par ailleurs, elle rappelle que la vaccination post-exposition a démontré son efficacité dès lors qu’elle est effectuée dans un délai maximum de 14 jours suivant l’apparition des signes cliniques du cas avéré d’hépatite A.

Pour expliquer le maintien à l’identique de la recommandation vaccinale des professionnels contre la coqueluche, la HAS met notamment en avant la très bonne couverture vaccinale des nourrissons en âge d’être vaccinés et qui sont plus susceptibles de développer une forme grave, voire mortelle, de la maladie. La HAS note également que les cas de transmission de la coqueluche par un professionnel à un nourrisson sont particulièrement rares. Elle rappelle toutefois que pour protéger le nouveau-né, la vaccination contre la coqueluche chez la femme enceinte ou des personnes susceptibles d’être en contact étroit avec celui-ci durant ses six premiers mois de vie (stratégie de cocooning) est fortement recommandée. Cela concerne notamment la mère en post partum, si elle n’a pas été vaccinée pendant la grossesse.

Enfin, s’agissant de la varicelle, pour expliquer le maintien de la recommandation, la HAS a tenu compte de la très forte proportion de personnes immunisées avant l’âge de 10 ans en France (plus de 90%), du très faible risque de transmission par les professionnels à des personnes à risque de forme grave et de l’existence de traitements antiviraux efficaces en cas d’infection.

Un 1er volet publié en mars dernier

Pour rappel, la HAS a publié en mars dernier la première partie de ses travaux, consacrée aux vaccins pour lesquels une obligation était en vigueur (Covid-19, diphtérie, tétanos, poliomyélite et hépatite B). La HAS y préconisait que la vaccination contre la Covid-19 soit fortement recommandée pour les professionnels, de même que la vaccination contre la diphtérie, le tétanos, et la poliomyélite, sauf à Mayotte où cette dernière devrait rester obligatoire. Elle s’est enfin prononcée en faveur du maintien de l’obligation vaccinale pour l’hépatite B, et son extension aux professionnels libéraux.

 

La HAS rappelle que ses recommandations sont susceptibles d’être modifiées selon l’évolution des données et du contexte sanitaire. Elle souligne également à cette occasion l’intérêt de la vaccination contre ces maladies, que ce soit en milieu professionnel ou en population générale.

Par ailleurs, la vaccination est complémentaire des autres mesures de prévention des infections des professionnels et des personnes avec lesquelles ils sont en contact. Le respect des mesures d’hygiène, l’utilisation d’un matériel adapté et de protections individuelles, la surveillance et la prise en compte des infections associées aux soins, ainsi que la formation des personnels pour prévenir ces risques constituent une priorité.

 

[1] Quelle est la couverture vaccinale contre la grippe des professionnels exerçant dans les établissements de santé ? Point au 1er juin 2022 (santepubliquefrance.fr)

[2] Objectif fixé par la stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l'antibiorésistance pour les professionnels de santé travaillant en établissements de santé.

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